Aller au contenu

Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
148
LES OISEAUX DE PROIE

qui pouvait assurer que le père de Diana se trouverait encore le lendemain dans son logement de la veille et même s’il serait reçu dans une maison de charité, alors que la paroisse à laquelle elle appartenait lui était inconnue. Ces honteuses épreuves auraient été aussi incompréhensibles pour Charlotte que les théories les plus abstraites de la métaphysique. Était-il donc étonnant que Charlotte fût affectueuse et tendre ?

« Si votre père voulait vous habiller décemment et vous donner des chaussures convenables, je pourrais m’arranger à vous garder pour rien, avait dit Priscilla à la fille de son parent déclassé ; mais, plus on fait pour lui, et moins il est disposé à faire lui-même ; de sorte que, pour tout dire d’un mot, vous voilà obligée de retourner avec lui, car je ne puis consentir à ce qu’un établissement comme le mien soit déconsidéré par la mauvaise tenue d’une de mes parentes. »

Diana avait été obligée d’entendre bien souvent de semblables paroles pendant sa première résidence au pensionnat, et le discours de Priscilla était à peine dit, que Charlotte bondissait dans la chambre, fraîche comme l’aurore, gaie comme pinson, avec une robe de soie claire, toute neuve, éclatante.

Si vivement cependant que Diana ressentît la différence entre la fortune de son amie et la sienne, elle ne laissait pas que de répondre, dans une certaine mesure, à l’affection de Charlotte. Son caractère ne pouvait être tout à coup modifié par cette atmosphère nouvelle d’affection et de tendresse, mais elle aimait sa généreuse amie à sa manière, elle la défendait avec une indignation touchante, si d’autres jeunes filles osaient exprimer le moindre doute sur son absolue perfection. Elle l’enviait et l’aimait en même temps. Un jour, elle acceptait