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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/340

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LA VIE DE FAMILLE

sept heures, nous eûmes sermon du matin et service divin. J’avais remarqué que les prêtres évitaient de trop exalter les sentiments du peuple ; eux-mêmes paraissaient dépourvus d’entraînement. Ce matin-là, ils me semblèrent faibles et dépourvus surtout d’éloquence populaire. Ils prêchaient la morale, mais on ne doit pas le faire dans les moments où il s’agit de conquérir les âmes ; il faut alors parler le langage chaud du cœur et des merveilles de la vie spirituelle. J’éprouvai une véritable satisfaction lorsque les prêtres si froids, qui avaient parlé ce matin-là, cédèrent la place à un homme plus âgé, d’un extérieur animé et enjoué, qui sortit de la foule des auditeurs, monta à la tribune et se mit à parler d’un autre ton, c’est-à-dire familier, intime et gai. C’était quelque chose dans le genre du père Taylor, que j’aurais voulu entendre parler ici ; mais tous les nègres, je le crains, en seraient devenus fous ! Le nouvel orateur annonça qu’il était étranger (évidemment Anglais), et présent par hasard à cette réunion. Mais il éprouvait le besoin de dire à ceux qui la composaient : « Mes amis, » et combien il était content de ce qu’il avait vu la nuit précédente (il s’adressait particulièrement aux noirs) ; il voulait leur faire connaître sa pensée sur l’Évangile et ce qu’il enseigne relativement à Dieu. « Voyez-vous, mes amis (telles furent à peu près ses paroles), quand un père a fait son testament, quand ses enfants sont assemblés pour l’ouvrir et connaître ses dernières volontés, ils ignorent les dispositions qu’il a jugées à propos de prendre, et plus d’un pourrait penser : « Il n’y a peut-être rien pour moi ! » Mais, lorsqu’à la lecture du testament ils voient que cet acte contient quelque chose pour John, quelque chose pour Mary, quelque chose pour Ben, en un mot pour chacun ; que tous ont une part