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Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/566

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L’article 12 du règlement de l’imprimerie Plantin imposait aux ouvriers l’obligation de « venir à l’ouvrage le matin entre cinq et six heures. Avant de se mettre à la besogne ils devaient attendre que la revision fût collationnée et toutes les fautes corrigées. Leur travail commençait à sept heures ». Ainsi, pour assurer le « collationnement de la revision », le correcteur était astreint aux mêmes heures d’entrée que les compagnons.

Arias Montanus — un correcteur dont certes on peut dire que sa grandeur devait le soustraire aux obligations corporatives — constate lui-même[1] que, pendant toute la durée de la correction de la Bible polyglotte, « tous les jours, sans excepter les dimanches et les fêtes, il passe onze heures à écrire, à étudier et à corriger ».

« Tous les jours, sans excepter les dimanches et les fêtes ! » La dérogation aux prescriptions de l’Église était telle qu’en prêtre scrupuleux Arias Montanus ne pouvait que s’en plaindre, en la signalant.

Le travail du dimanche n’était point cependant une infraction aux commandements de Dieu seulement, c’était aussi une dérogation, une violation des ordonnances royales, des édits sur la réglementation de l’imprimerie. Dès le 31 août 1539, François Ier déclarait déjà[2] : « Item, que lesdictz compagnons feront et parachèveront les journées aux vigiles des festes, sans rien laisser pour faire ne besongner lesdictes festes, auxquels jours lesdicts maistres ne seront tenuz ouvrir imprimerie pour besongner si n’était pour faire quelque chose préparative et légère pour le lendemain. » (Art. 7.)

« Item iceulx compagnons ne feront austres festes que celles qui sont commandées par l’Église. » (Art. 8.)

Plus tard, le roi précise et complète une règle qui semble n’avoir été ici qu’ébauchée. Dans la déclaration du 10 septembre 1572, qui confirme l’édit de mai 1571, Charles IX édicte formellement « l’obligation d’observer le repos des dimanches et jours de fêtes » ; l’article 8 de l’édit de mai 1571 avait déjà mis au nombre des jours qui doivent être considérés par les compagnons imprimeurs comme fériés, la fête de saint Jean Porte-Latine, la demi-journée de Carême prenant et le Grand-Vendredy.

Tous les règlements ultérieurs furent unanimes sur ce sujet. L’ar-

  1. D’après Rooses, Christophe Plantin, imprimeur anversois, p. 127.
  2. Lettres patentes du 31 août 1539, données à Villers-Cotterets.