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Page:Brossard - Correcteur typographe, 1934.djvu/365

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Voilà qui est étrange ! Les partisans de la division épellative ou syllabique n’ont jamais songé à supprimer les accents souscrits (sans doute les cédilles dans la circonstance ?), pas plus que les accents suscrits, auxquels avec leur système ils laissent toute leur valeur. Tout au contraire de ce qu’il espérait, ce reproche, loin d’atteindre ses contradicteurs, retombe sur M. Desormes, qui, sans le savoir, se fait à lui-même son procès ; on le verra avec les divisions étymologiques dés-honorer et autres semblables.

Non content de ces affirmations, M. Desormes cherche maintenant à embarrasser les défenseurs du système syllabique, en leur objectant certaine contradiction superficielle, inhérente au système : « Dans les exemples présentés par les partisans de l’épellation syllabique, il s’en trouve plusieurs de même essence qui sont à la fois divisés par l’épellation et par l’étymologie[1] sans que rien ne vienne légitimer une anomalie que l’esprit aura peine à s’expliquer. En effet, qui pourra comprendre pourquoi l’on divise sub-stituer étymologiquement et su-blingual arbitrairement, étant donné que les deux préfixes sub ont même origine et même importance. »

À ces lignes, la réponse pourrait être fort simple, et c’est encore M. Desormes lui-même qui la fournirait lorsqu’il avoue, en parlant des bizarreries de la division étymologique : « Nous n’y pouvons rien, car l’épellation (à ce mot, dans notre cas, nous substituerions : l’étymologie) elle-même ne saurait corriger ces travers, étant donné qu’il y a là une question d’euphonie, toute de convention, absolument étrangère à celle qui nous occupe. »

La riposte serait sérieuse et mériterait d’être prise en considération : c’est une arme à deux tranchants dont chaque adversaire pourrait user au gré de ses désirs ou de ses besoins. Mais nous avons mieux à opposer à M. Desormes, en puisant notre réfutation dans son propre texte.

Pourquoi M. Desormes, qui ne peut comprendre les divisions épellatives sub-stituer et su-blingual, même par raison d’euphonie, ne divise-t-il pas étymologiquement, « pour être complètement d’accord avec lui-même[2], des mots qui pourtant s’y prêtent tout naturellement, comme : des-cription, pres-cription, des-celler », alors qu’il n’hésite pas à diviser bas-tion » ?

Pourquoi, s’appuyant sur cet exemple nullement probant et qui, en définitive, se retourne contre lui dans d’autres circonstances, abandonne-t-il « l’étymologie chaque fois (nous aurons bientôt ainsi plus d’exceptions que de règles) que cela pourra être fait au profit de la prononciation (toujours l’euphonie !), ce qui est autant de gagné (!) sur une langue qui peut être considérée comme très riche, mais aussi comme très épineuse » ?

Pourquoi, encore, diviser : arc-hange et arche-vèque ? Si l’étymologie est la même (comme avec sub dans les mots sub-stituer et su-blingual), d’où vient cette différence dans la manière de diviser ? Soyons donc logiques et suivons l’épellation : ar-chan-ge, ar-che-vèque. — Objectera-t-on, à notre encontre, les divisions pan-théisme et pa-nè-gyrique ? Il sera facile de répondre que, dans cet

  1. M. Desormes a plutôt voulu dire : « … Il s’en trouve plusieurs de même essence, dont les uns sont tantôt divisés par l’épellation, et les autres tantôt par l’étymologie… »
  2. Singulière façon, on en conviendra, d’être d’accord avec les lignes que nous citions au début : « M. Théotiste Lefevre… sont partisans d’un système que nous ne saurions accepter…, il n’est pas permis de violenter ainsi notre langue au profit exclusif de l’épellation par syllabe. »