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Page:Brossard - Correcteur typographe, 1934.djvu/366

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exemple, il y a identité, quant à la division suivie qui est épellative, ce qui n’est nullement le cas avec arc-hange et arche-vêque, coupures qui ne sont l’une par rapport à l’autre ni épellatives ni étymologiques. La contradiction qu’on voudrait relever dans pan-théisme et dans pa-né-gyrique n’est, pour le système syllabique, qu’apparente ; à notre avis, on ne saurait en effet ici se préoccuper en quoi que ce soit de l’étymologie, en raison de la différence de prononciation des deux syllabes pan, dont l’une est nasale et dont l’autre a le son ouvert. Question d’euphonie ! on le reconnaîtra.

Dans un moment de franchise, et tout au contraire de ce qu’il a dit au début de son argumentation, M. Desormes reconnaît maintenant, que la division étymologique, dans certains cas, violente notre langue au profit sans doute de la division épellative, et il fait cet aveu : « Nous ne sommes pas d’avis de diviser étymologiquement tous les mots, ce qui donnerait des divisions dans le genre de amb-ition, mult-itude, post-èrieur, bust-ion, vin-aigre. » C’est par ces simples mots que M. Desormes supprime, sans les discuter, la plus grosse objection soulevée contre la division étymologique et la plus grande difficulté qui se soit opposée à son adoption. Comment, en effet, se reconnaître — et l’auteur des Notions de typographie le pourrait-il lui-même, malgré l’érudition certaine dont il fait preuve, ici — au milieu de l’inextricable chaos, créé par les étymologistes, de la division des mots en préfixe, radical et suffixe ?

Cette impossibilité n’a point échappé à M. Desormes ; aussi, désireux de faire, triompher quand même les idées qu’il préconise, il essaye de porter la discussion sur un autre terrain : « Mais nous pensons que chaque fois que l’étymologie nous donne un ou deux mots français dérivés du grec ou du latin, sans en changer ni la prononciation[1] ni l’orthographe, comme dèca-stère, trans-action, ou dans lesquels se trouvent les consonnes racines sc, st, qui aident si bien à la prononciation lorsqu’elles se trouvent au commencement de la seconde partie d’un mot divisé, nous pensons qu’il est préférable de suivre l’étymologie, qui s’indique d’elle-même. » — « Parmi les mots peu employés[2], prenons-en quelques-uns au hasard, et l’on verra combien nos observations (celles énumérées au début contre la division épellative) sont fondées : métas-tase, divisé d’après l’épellation, fera pour le lecteur inhabile métâ-tase ; bas-tingage fera bâ-tingage ; ergas-tule fera ergâ-tule ; épis-taxis fera épi-taxis ; épis-tyle fera épi-tyle ; etc. » D’autres exemples pourraient encore être donnés, s’il en était besoin.

Nous le regrettons très vivement, mais ici encore nous sommes en contradiction formelle avec M. Desormes, et nous prenons la liberté de lui demander si réellement nous devons prononcer métasse-tase (d’après lui) ou, tout simplement méta-stase (d’après nous), dont la division est alors d’accord avec

  1. À la manière de M. Leclerc. — On le constatera avec les divisions étymologiques pan-théon ou pan-égyrique, où, au contraire du son nasal ouvert (pa-né) qu’il doit avoir, le mot pan-égyrique a, comme dans pan-théon, le son nasal fermé pan. M. Desormes aurait pu soumettre cette division étymologique d’un mot peu employé à un lecteur inhabile, et alors il aurait été édifié.
  2. Évidemment, avec des mots peu employés et aussi un lecteur inhabile, on peut obtenir une confirmation au moins apparente de ces idées ; mais est-ce bien faire preuve de bonne foi ? Examinons la question sur un terrain moyen.