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Page:Brunet - Les hypocrites (1) - La folle expérience de Philippe, 1945.pdf/141

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LA FOLLE EXPÉRIENCE

pour sa pénitence, il est tombé sur une grosse femme, dont la poitrine me fait penser, je ne sais pourquoi, à un ministre protestant… »

Où Philippe prenait-il cela ? Il avait déjà parlé de Bremond avec Dufresne, et celui-ci n’avait que souri, et voilà qu’il faisait du docteur un lecteur de mystiques. Philippe s’amusait, remarquant que c’est toujours par des traits pareils qu’on découvre les romans à clefs et qu’on dit de ces mensonges plus ou moins logiques : comme c’est vrai !

« Ses yeux luisent de désir, et, quand il fume son cigare, il glisse une grivoiserie, mais ça fait drôle dans sa bouche et ce serait plus naturel pour lui de parler de scatologie et d’étaler cléricalement son fumier rabelaisien… »

Philippe lui-même glissait à l’anticléricalisme et il s’interrompit pour songer à un autre article qu’il donnerait à Pothier sur le goût des moines pour le mot cru : ce serait une de ses attaques sans risques comme les aimait Pothier et que ce dernier lui paierait d’un bon cachet. Il voulut quand même terminer son article pieux :

« Le docteur s’entend à ses affaires, et je songe que le jansénisme est père de l’utilitarisme religieux, comme le puritanisme des marchands américains et de mon docteur est sévère pour leur caisse aussi bien que pour leur femme. Et ils sont toujours savants : le docteur me dit souvent, avec un sourire connaisseur, que la théologie a été expurgée à l’usage des sémina-