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Page:Brunetière - Cinq lettres sur Ernest Renan, 1904.djvu/74

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Ouvrez maintenant la France juive, et dites moi si la partie théorique n’en est pas du Renan tout pur, et du meilleur Renan, le plus sérieux, l’auteur de l’Histoire générale et comparée des Langues sémitiques ? Il y a du Toussenel, il y a du

    que de mettre toutes les races sur le pied d’égalité… Je suis donc le premier à reconnaître que la race sémitique, comparée à la race indo-européenne, représente réellement une combinaison inférieure de la nature humaine. »

    C’est exactement ce qu’on dit du nègre aux Etats-Unis. Je lis encore dans l’Antéchrist :

    « Ce ne peut être sans raison que ce pauvre Israël a passé sa vie de peuple à être massacré. Quand toutes les nations et tous les siècles vous ont persécuté il faut bien qu’il y ait à cela quelque motif. Le Juif, jusqu’à notre temps, s’insinuait partout en réclamant le droit commun, mais en réalité le Juif n’était pas dans le droit commun ; il gardait son statut particulier ; il voulait avoir les garanties de tous, et par-dessus le marché, ses exceptions, ses lois à lui. Il voulait les avantages d’une nation, sans être une nation, sans participer aux charges des nations. »

    L’auteur de la France juive n’a pas dit autre chose. Et je n’ai pas enfin souvenance qu’il ait dit ceci, que je trouve dans l’Eglise chrétienne :

    « Le régime du ghetto est toujours funeste. Or, les pratiques du pharisaïsme et du talmudisme faisaient de ce régime de réclusion l’état naturel du peuple juif. Le ghetto a été pour le Juif moins une contrainte venant du dehors qu’une conséquence de l’esprit talmudique. »

    Si ce n’étaient là que des opinions, il suffirait de leur en opposer de contraires, mais ce qui fait la gravité de ces déclarations que, sans doute, on ne saurait traiter de boutades, c’est que dans les écrits où je les reprends, elles sont formulées au nom de « l’histoire » et de la « science ». Renan eût dit volontiers que ce ne sont point là des « opinions » qu’il exprimait, mais des « faits » qu’il constatait, et les ayant constatés, « il s’en laverait les mains », son rôle de savant n’étant, comme ils disent dans l’école, que de constater « des faits ».