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Page:Brunetière - Cinq lettres sur Ernest Renan, 1904.djvu/98

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CINQ LETTRES SUR ERNEST RENAN

la « Religion ». La question du miracle n’est autre que la question de la « liberté de Dieu » : on ne la résout pas, et on ne pense pas librement quand on refuse de la poser, en affirmant qu’il n’y a pas de Dieu, et que d’ailleurs, s’il y en avait un, il ne saurait déroger à l’immutabilité de ses lois. La liberté de penser serait vraiment, comme on dit, à trop bon marché, si elle ne consistait que dans la liberté de ne pas croire, et il se peut qu’il y ait des raisons de croire comme il y en a de douter.

Et on a loué enfin Renan d’avoir été « l’apôtre de la tolérance », mais on a oublié de nous dire contre qui et dans quelles circonstances il avait exercé son apostolat. Bayle, protestant au nom de la « conscience errante » contre la révocation de l’édit de Nantes, est un « apôtre de la tolérance ». Voltaire, intervenant dans l’affaire des Calas, — et quels que fussent d’ailleurs ses motifs de derrière la tête, — est un « apôtre de la tolérance ». Dans quelle autre affaire que la sienne avons nous vu Renan intervenir ? Et quelle cause lui a-t-il fallu défendre contre l’intolérance ? Il a revendiqué, théoriquement, — car je ne sache pas que personne le lui ait dis-