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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/428

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rée n’est pas limpide comme l’eau, mais un peu obscure comme de l’huile ; et, si le zinc est mêlé de quelques parties de fer, ce métal s’en sépare en se précipitant, ce qui fournit un autre moyen que celui du soufre pour purifier le zinc. L’on doit encore observer que la chaux et les fleurs de zinc se dissolvent dans cet acide et dans l’acide vitriolique et que, par conséquent, cela fait une grande exception à la prétendue règle que les acides ne doivent pas dissoudre les chaux ou terres métalliques.

L’acide marin dissout aussi le zinc très facilement, moins pleinement que l’acide nitreux, car il ne peut en prendre que la huitième partie de son poids ; il ne se forme pas de cristaux après l’évaporation de cette dissolution, mais seulement un sel en gelée blanche et très déliquescent, dont la qualité est fort corrosive.

Le zinc, et même les fleurs de zinc, se dissolvent aussi dans l’acide du vinaigre, et il en résulte des cristaux ; il en est de même de l’acide du tartre : ainsi tous les acides minéraux ou végétaux, et jusqu’aux acerbes, tels que la noix de galle, agissent sur le zinc ; les alcalis, et surtout l’alcali volatil, le dissolvent aussi, et cette dernière dissolution donne, après l’évaporation, un sel blanc et brillant qui attire l’humidité de l’air et tombe en déliquescence.

Voilà le précis de ce que nous savons sur le zinc : on voit qu’étant très volatil, il doit être disséminé partout ; qu’étant susceptible d’altération et de dissolution par tous les acides et par les alcalis, il peut se trouver en état de chaux ou de précipité dans le sein de la terre ; d’ailleurs, les matières qui le contiennent en plus grande quantité, telles que la pierre calaminaire et les blendes, sont composées des détriments du fer et d’autres minéraux ; l’on ne peut donc pas douter que ce demi-métal ne soit d’une formation bien postérieure à celle des métaux.


DU PLATINE

Il n’y a pas un demi-siècle qu’on connaît le platine en Europe, et jamais on n’en a trouvé dans aucune région de l’ancien continent : deux petits endroits dans le nouveau monde, l’un dans les mines d’or de Santa-Fé, à la Nouvelle-Grenade, l’autre dans celle de Choco, province du Pérou, sont jusqu’ici les seuls lieux d’où l’on ait tiré cette matière métallique, que nous ne connaissons qu’en grenailles mêlées de sablon magnétique, de paillettes d’or, et souvent de petits cristaux de quartz, de topaze, de rubis, et quelquefois de petites gouttes de mercure. J’ai vu et examiné de très près cinq ou six sortes de platine que je m’étais procurées par diverses personnes et en différents temps : toutes ces sortes étaient mêlées de sablon magnétique et de paillettes d’or ; dans quelques-unes il y avait de petits cristaux de quartz, de topaze, etc., en plus ou moins grande quantité ; mais je n’ai vu de petites gouttes de mercure que dans l’une de ces sortes de platine[1]. Il se pourrait donc que cet état de grenaille, sous lequel nous connaissons le platine, ne fût point son état naturel, et l’on pourrait croire qu’il a été concassé dans les moulins où l’on broie les minerais d’or et d’argent, et que les gouttelettes de mercure qui s’y trouvent quelquefois ne viennent que de l’amalgame qu’on emploie au traitement de ces mines : nous ne sommes donc pas certain que cette forme de grenaille soit sa forme native, d’autant qu’il paraît, par le témoignage de quelques voyageurs, qu’ils indiquent le platine comme une pierre métallique très dure, intraitable, dont néanmoins les naturels du pays

  1. M. Lewis et M. le comte de Milly ont tous deux reconnu des globules de mercure dans le platine qu’ils ont examiné. M. Bergman dit de même qu’il n’a point traité de platine dans lequel il n’en ait trouvé. Opuscules, t. II, p. 183.