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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/100

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zéolithes. Depuis Féroë il se portera sur les îles de Shetland, qui sont toutes volcanisées, et de là aux îles Orcades, lesquelles paraissent s’être élevées en entier d’une mer de feu. Les Orcades sont comme adhérentes aux îles Hébrides. C’est dans cet archipel que se trouvent celles de Saint-Kilda, Sky, Jona, Lyri, Hikenkil, la vaste et singulière caverne basaltique de Staffa, connue sous le nom de grotte de Fingal, l’île de Nult qui n’est qu’un composé de basalte, pétri, pour ainsi dire, avec de la zéolithe.

De l’île de Nult, on peut aller en Écosse par celle de Kereyru, également volcanisée, et arriver à Don Staffugé ou à Dunkel, sur les laves et les basaltes que l’on peut suivre sans interruption par le duché d’Inverary, par celui de Perth, par Glascow, jusqu’à Édimbourg. Ici, les volcans semblent avoir trouvé des bornes qui les ont empêchés d’entrer dans l’Angleterre proprement dite, mais ils se sont repliés sur eux-mêmes : on les suit sans interruption et sur une assez large zone qui s’étend depuis Dunbar, Cowper, Stirling, jusqu’au bord de la mer, vers Port-Patrick. L’Irlande est en face, et l’on trouve à une petite distance les écueils du canal Saint-Georges, qui sont aussi volcanisés ; l’on touche bientôt à cette immense colonnade connue sous le nom de Chaussée des Géants, et formant une ceinture de basalte prismatique, qui rend l’abord de l’Irlande presque inaccessible de ce côté.

En France, on peut reconnaître des volcans éteints en Bretagne, entre Royan et Tréguier, et les suivre dans une partie du Limousin, et en Auvergne, où se sont faits de très grands mouvements, et de fortes éruptions de volcans actuellement éteints ; car les montagnes, les pics, les collines de basalte et de lave y sont si rapprochés, si accumulés, qu’ils offrent un système bizarre et disparate, très différent de la disposition et de l’arrangement de toutes les autres montagnes. Le mont Dore et le Puy-de-Dôme peuvent être regardés comme autant de volcans principaux qui dominaient sur tous les autres.

Les villes de Clermont, de Riom, d’Issoire ne sont bâties qu’avec des laves et ne reposent que sur des laves. Le cours de ces terrains volcanisés s’étend jusqu’au delà de l’Allier, et on en voit des indices dans une partie du Bourbonnais, et jusque dans la Bourgogne, auprès du mont Cenis, où l’on a reconnu le pic conique de Drevin, formé par un faisceau de basalte, qui s’élève en pointe à trois cents pieds de hauteur, et forme une grande borne, qu’on peut regarder comme la limite du terrain volcanisé. Ces mêmes volcans d’Auvergne s’étendent, d’un côté, par Saint-Flour et Aurillac, jusqu’en Rouergue, et de l’autre, dans le Velay ; et en remontant la Loire jusqu’à sa source, parmi les laves, nous arrivons au mont Mezin, qui est un grand volcan éteint, dont la base a plus de douze lieues de circonférence, et dont la hauteur s’élève au-dessus de neuf cents toises.

Le Vivarais est attenant au Velay, et l’on y voit un très grand nombre de cratères de volcans éteints, et des chaussées de basaltes, que l’on peut suivre dans leur largeur jusqu’à Rochemaure, au bord du Rhône, en face de Montélimar ; mais leur développement, en longueur, s’étend par Cassan, Saint-Tibéri, jusqu’à Agde, où la montagne volcanique de Saint-Loup offre des escarpements de lave, d’une grande épaisseur et d’une hauteur considérable.

Il paraît qu’auprès d’Agde les laves s’enfoncent sous la mer ; mais on ne tarde pas à les voir reparaître entre Marseille et Toulon, où l’on connaît le volcan d’Ollioules et celui des environs de Tourves. De grands dépôts calcaires ont recouvert postérieurement plusieurs de ces volcans ; mais on en voit dont les sommités paraissent sortir du milieu de ces antiques dépouilles de la mer : ceux des environs de Fréjus et d’Antibes sont de ce nombre.

Ici les Alpes maritimes ont servi de barrière aux feux souterrains de la Provence, et les ont, pour ainsi dire, empêchés de se joindre à ceux de l’Italie, par la voie la plus courte ; car, derrière ces mêmes Alpes, il se trouve des volcans qui, en ligne droite, ne sont éloignés que de trente lieues de ceux de Provence.

La zone incendiée a donc pris une autre route : on peut même dire qu’elle a une double