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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/117

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même, ou dans le fer actuellement aimanté ; et il ne serait pas possible de l’exciter, ou de la produire par un autre moyen ; mais la percussion, le frottement, et même la seule exposition aux impressions de l’atmosphère, suffisent pour donner au fer cette vertu magnétique ; preuve évidente qu’elle dépend d’une force extérieure qui s’applique, ou plutôt flotte à sa surface et se renouvelle sans cesse.

En considérant les phénomènes de la direction de l’aimant, on voit que les forces qui produisent et maintiennent cette direction se portent généralement de l’équateur aux pôles terrestres, avec des variations dont les unes ne sont qu’alternatives d’un jour à l’autre, et s’opèrent par des oscillations momentanées et passagères, produites par les variations de l’état de l’air, soit par la chaleur ou le froid, soit par les vents, les orages, les aurores boréales ; les autres sont des variations en déclinaison et en inclinaison, dont les causes, quoique également accidentelles, sont plus constantes, et dont les effets ne s’opèrent qu’en beaucoup plus de temps ; et tous ces effets sont subordonnés à la cause générale, qui détermine la direction de la force électrique de l’équateur vers les pôles.

En examinant attentivement les inflexions que la direction générale de l’électricité et du magnétisme éprouve de toutes ces causes particulières, on reconnaît, d’après les observations récentes et anciennes, que les grandes variations du magnétisme ont une marche progressive du nord à l’est ou à l’ouest, dans certaines périodes de temps, et que la force magnétique a, dans sa direction, différents points de tendance ou de détermination que l’on doit regarder comme autant de pôles magnétiques vers lesquels, selon le plus ou moins de proximité, se fléchit la direction de la force générale qui tend de l’équateur aux deux pôles du globe.

Ce mouvement en déclinaison ne s’opère que lentement ; et cette déclinaison paraissant être assez constante pendant quelques années, on peut regarder les observations faites depuis douze à quinze ans comme autant de déterminations assez justes de la position des lieux où elles ont été faites. Je joins ici les tables de ces observations, et j’en ai rédigé les principaux résultats en cartes magnétiques qui seront très utiles à la navigation, si la déclinaison n’a que peu ou point changé depuis douze à quinze ans : ces tables donneront connaissance aux navigateurs de tous les points où cette déclinaison a été récemment observée, et par conséquent de tous les lieux relatifs à ces observations.

On doit réunir aux phénomènes de la déclinaison de l’aimant ceux de son inclinaison ; ils nous démontrent que la force magnétique prend, à mesure que l’on approche des pôles, une tendance de plus en plus approchante de la perpendiculaire à la surface du globe, et cette inclinaison, quoiqu’un peu modifiée par la proximité des pôles magnétiques qui déterminent la déclinaison, nous paraîtra cependant beaucoup moins irrégulière dans sa marche progressive vers les pôles terrestres, et plus constante que la déclinaison dans les mêmes lieux en différents temps.

Pour se former une idée nette de cette inclinaison de l’aimant, il faut se représenter la figure de la terre, renflée sous l’équateur et abaissée sous les pôles, ce qui fait une courbure dont les degrés ne sont point tous égaux comme ceux d’une sphère parfaite ; il faut en même temps concevoir que le mouvement qui tend de l’équateur aux pôles doit suivre cette courbure et que, par conséquent, sa direction n’est pas simplement horizontale, mais toujours inclinée de plus en plus en partant de l’équateur pour arriver aux pôles.

Cette inclinaison de l’aimant ou de l’aiguille aimantée démontre donc évidemment que la force qui produit ce mouvement suit la courbure de la surface du globe, de l’équateur dont elle part, jusqu’aux pôles où elle arrive ; si l’inclinaison de l’aiguille n’était pas dérangée par l’action des pôles magnétiques, elle serait donc toujours très petite ou nulle dans les régions voisines de l’équateur, et très grande ou complète, c’est-à-dire de 90 degrés dans les parties polaires.