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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/123

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ARTICLE II

DE LA NATURE ET DE LA FORMATION DE L’AIMANT.

L’aimant n’est qu’un minéral ferrugineux, qui a subi l’action du feu, et ensuite a reçu, par l’électricité générale du globe terrestre, son magnétisme particulier. L’aimant primordial est une mine de fer en roche vitreuse, qui ne diffère des autres mines de fer produites par le feu primitif qu’en ce qu’elle attire puissamment les autres matières ferrugineuses, qui ont de même subi l’action du feu. Ces mines de l’aimant primordial sont moins fusibles que les autres mines primitives de fer ; elles approchent de la nature du régule de ce métal, et c’est par cette raison qu’elles sont plus difficiles à fondre : l’aimant primordial a donc souffert une plus violente ou plus longue impression du feu primitif que les autres mines de fer, et il a en même temps acquis la vertu magnétique par l’action de la force qui, dès le commencement, a produit l’électricité du globe.

Cet aimant de première formation a communiqué sa vertu aux matières ferrugineuses qui l’environnaient ; il a même formé de nouveaux aimants, par le mélange de ses débris avec d’autres matières, et ces aimants de seconde formation ne sont aussi que des minéraux ferrugineux provenant des détriments du fer en état métallique, et qui sont devenus magnétiques par la seule exposition à l’action de l’électricité générale. Et, comme le fer qui demeure longtemps dans la même situation acquiert toutes les propriétés du véritable aimant, on peut dire que l’aimant et le fer ne sont au fond que la même substance qui peut également prendre du magnétisme à l’exclusion de toutes les autres matières minérales, puisque cette même propriété magnétique ne se trouve dans aucun autre métal, ni dans aucune autre matière vitreuse ou calcaire. L’aimant de première formation est une fonte ou régule de fer, mêlée d’une matière vitreuse, pareille à celle des autres mines primordiales de fer ; mais, dans les aimants de seconde formation, il s’en trouve dont la matière pierreuse est calcaire ou mélangée d’autres substances hétérogènes. Ces aimants secondaires varient plus que les premiers, par la couleur, la pesanteur et par la quantité de force magnétique.

Mais cette matière vitreuse ou calcaire des différentes pierres d’aimant n’est nullement susceptible de magnétisme, et ce n’est qu’aux parties ferrugineuses contenues dans ces pierres qu’on doit attribuer cette propriété ; et dans toute pierre d’aimant, vitreuse ou calcaire, la force magnétique est d’autant plus grande, que la pierre contient plus de parties ferrugineuses sous le même volume, en sorte que les meilleurs aimants sont ceux qui sont les plus pesants : c’est par cette raison qu’on peut donner au fer, et mieux encore à l’acier, comme plus pesant que le fer, une force magnétique encore plus grande que celle de la pierre d’aimant, parce que l’acier ne contient que peu ou point de particules terreuses, et qu’il est presque uniquement composé de parties ferrugineuses réunies ensemble sous le plus petit volume, c’est-à-dire d’aussi près qu’il est possible.

Ce qui démontre l’affinité générale entre le magnétisme et toutes les mines de fer qui ont subi faction du feu primitif, c’est que toutes ces mines sont attirables à l’aimant que réciproquement elles attirent, au lieu que les mines de fer en rouille, en ocre et en grains, formées postérieurement par l’intermède de l’eau, ont perdu cette propriété magnétique, et ne la reprennent qu’après avoir subi de nouveau l’action du feu. Il en est de même de tous nos fers et de nos aciers ; c’est parce qu’ils ont, comme les mines primitives, subi l’action d’un feu violent qu’ils sont attirables à l’aimant. Ils ont donc, comme les mines primor-