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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/124

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diales de fer, un magnétisme passif que l’on peut rendre actif, soit par le contact de l’aimant, soit par la simple exposition à l’impression de l’électricité générale.

Pour bien entendre comment s’est opérée la formation des premiers aimants, il suffit de considérer que toute matière ferrugineuse qui a subi l’action du feu, et qui demeure quelque temps exposée à l’air dans la même situation, acquiert le magnétisme et devient un véritable aimant : ainsi, dès les premiers temps de l’établissement des mines primordiales de fer, toutes les parties extérieures de ces masses, qui étaient exposées à l’air et qui sont demeurées dans la même situation, auront reçu la vertu magnétique par la cause générale qui produit le magnétisme du globe, tandis que toutes les parties de ces mêmes mines qui n’étaient pas exposées à l’action de l’atmosphère n’ont point acquis cette vertu magnétique ; il s’est donc formé dès lors, et il peut encore se former des aimants sur les sommets et les faces découvertes des mines de fer, et dans toutes les parties de ces mines qui sont exposées à l’action de l’atmosphère.

Ainsi, les mines d’aimant ne sont que des mines de fer qui se sont aimantées par l’action de l’électricité générale ; elles ne sont pas, à beaucoup près, en aussi grandes masses que celles de fer, parce qu’il n’y a que les parties découvertes de ces mines qui aient pu recevoir la vertu magnétique : les mines d’aimant ne doivent donc se trouver et ne se trouvent en effet que dans les parties les plus extérieures de ces mines primordiales de fer et jamais à de grandes profondeurs, à moins que ces mines n’aient été excavées, ou qu’elles ne soient voisines de quelques cavernes, dans lesquelles les influences de l’atmosphère auraient pu produire le même effet que sur les sommets ou sur les faces découvertes de ces mines primitives.

Maintenant, on ne peut douter que le magnétisme général du globe ne forme deux courants, dont l’un se porte de l’équateur au nord, et l’autre en sens contraire de l’équateur au sud : la direction de ces courants est sujette à variation, tant pour les lieux que pour le temps, et ces variations proviennent des inflexions du courant de la force magnétique, qui suit le gisement des matières ferrugineuses, et qui change à mesure qu’elles se découvrent à l’air ou qu’elles s’enfouissent par l’affaissement des cavernes, par l’effet des volcans, des tremblements de terre, ou de quelque autre cause qui change leur exposition ; elles acquièrent donc ou perdent la vertu magnétique par ce changement de position, et dès lors, la direction de cette force doit varier et tendre vers ces mines ferrugineuses nouvellement découvertes en s’éloignant de celles qui se sont enfoncées.

Les variations dans la direction de l’aimant démontrent que les pôles magnétiques ne sont pas les mêmes que les pôles du globe, quoique, en général, la direction de la force qui produit le magnétisme tende de l’équateur aux deux pôles terrestres. Les matières ferrugineuses, qui seules peuvent recevoir du courant de cette force les propriétés de l’aimant, forment des pôles particuliers selon le gisement local et la quantité plus ou moins grande des mines d’aimant et de fer.

L’aimant primordial n’a pas acquis au même instant son attraction et sa direction ; car le fer reçoit d’abord la force attractive, et ne prend les pôles qu’en plus ou moins de temps, suivant sa position et selon la proportion de ses dimensions. Il paraît donc que, dès le temps de l’établissement et de la formation des premières mines de fer par le feu primitif, les parties exposées à l’action de l’atmosphère ont reçu d’abord la force attractive, et ont pris ensuite des pôles fixes et acquis la puissance de se diriger vers les parties polaires du globe. Ces premiers aimants ont certainement conservé ces forces attractives et directives, quoiqu’elles agissent sans cesse au dehors, ce qui semblerait devoir les épuiser ; mais au contraire elles se communiquent de l’aimant au fer, sans souffrir aucune perte ni diminution.

Plusieurs physiciens, qui ont traité de la nature de l’aimant, se sont persuadé qu’il circulait dans l’aimant une matière qui en sortait incessamment après y être entrée et