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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/139

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que quand ils étaient réunis en un seul bloc. Cependant les gros aimants, même les plus faibles, répandent en proportion leur force à de plus grandes distances que les petits aimants les plus forts ; et si l’on joint ensemble plusieurs petits aimants pour n’en faire qu’une masse, la vertu de cette masse s’étendra beaucoup plus loin que celle d’aucun des morceaux dont ce bloc est composé. Dans tous les cas, cette force agit de plus loin sur un autre aimant, ou sur le fer qui ne l’est pas[1].

On peut reconnaître assez précisément les effets de l’attraction de l’aimant sur le fer, et sur le fer aimanté par le moyen des boussoles dont l’aiguille nous offre aussi, par son mouvement, les autres phénomènes du magnétisme général. La direction de l’aiguille vers les parties polaires du globe terrestre, sa déclinaison et son inclinaison dans les différents lieux du globe, sont les effets de ce magnétisme dont nous avons tiré le grand moyen de parcourir les mers et les terres inconnues, sans autre guide que cette aiguille qui seule peut nous conduire lorsque l’aspect du ciel nous manque, et que tous les astres sont voilés par les nuages, les brouillards et les brumes[2].

    Aimant, dans l’Encyclopédie, par M. Le Monnier, qui a traité cette matière avec autant de méthode que de justesse et de discernement.

    M. Æpinus a éprouvé que, si on rompt en deux une barre de l’acier le plus dur, qu’on approche les deux morceaux l’un au bout de l’autre, qu’on les presse de manière qu’ils n’en forment qu’un seul, et qu’on aimante cette barre composée, on n’y trouvera que deux pôles ; mais si, ensuite, on sépare les deux morceaux, ils offriront chacun deux pôles opposés ; le pôle boréal et le pôle austral demeurant chacun au bout qu’ils occupaient. nos 103 et 104.

  1. Les distances auxquelles l’aimant agit sur le fer aimanté et sur celui qui ne l’est pas sont dans le rapport de 5 à 2. Musschenbroëck, p. 117.
  2. Il faut que les aiguilles des boussoles soient faites de bon acier homogène, sans soufflures ni fêlures ; leur surface doit être polie, sans inégalités ni cavités, surtout sans points saillants qui ne manqueraient pas de troubler l’effet général du magnétisme par des effets particuliers et contraires ; leur forme doit être aussi simple que leur matière est pure ; il faut seulement que ces aiguilles diminuent et se terminent en pointe aux deux extrémités. On a reconnu, après plusieurs essais, qu’une aiguille de cinq pouces et demi ou six pouces de longueur était plus précise dans ses indications de la déclinaison que les aiguilles plus courtes ou plus longues ; le poids de cette aiguille de six pouces sera de cent cinquante ou cent soixante grains. Si elle était plus légère, elle serait moins assurée sur son pivot, et si elle était plus pesante, la résistance, par le frottement sur ce même pivot, la rendrait moins agile. Les aiguilles, pour les boussoles d’inclinaison, doivent être un peu plus longues. On aura soin de tremper les unes et les autres, pour en rendre l’acier plus élastique, et on leur donnera la couleur bleue pour les préserver plus longtemps de la rouille. Ce pivot ne sera ni de fer ni d’acier, mais de cuivre, ou de toute autre matière dure et susceptible de poli : l’extrémité de ce pivot doit être arrondie et convexe pour entrer et s’ajuster exactement dans la cavité de la chape, qui sera de la même matière dure et polie ; et, s’il l’on enduit cette cavité d’un peu d’huile, ou mieux encore d’une petite quantité de poudre très fine de talc ou de molybdène, le mouvement de l’aiguille aura toute la liberté que l’on peut lui donner, ou plutôt obtenir. Pour faire des aiguilles de boussole, dit Musschenbroëck, l’acier doit être préféré au fer, parce qu’il prend beaucoup plus de force magnétique. On a observé qu’il en recevait jusqu’à sept fois plus ; il la reçoit à la vérité plus lentement, mais il la conserve beaucoup plus longtemps que le fer. Dissertatio de magnete, p. 230.

    Les aiguilles aimantées, de différentes longueurs, ne s’arrêtent pas précisément dans la même direction, quoiqu’on leur présente un seul et même aimant : mais c’est leur différente forme qui donne lieu à cette différence ; celles qui m’ont le mieux réussi, c’est-à-dire celles dont la direction a toujours été la même, avaient les deux bouts droits et semblables. Mémoire sur les aiguilles aimantées, par M. du Fay, dans ceux de l’Académie des sciences, année 1733… Suivant M. Mitchel, la meilleure proportion des dimensions, pour faire des aiguilles de boussole ou des lames d’acier artificielles, est six pouces de longueur, six lignes de largeur et un tiers de ligne d’épaisseur.