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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/202

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ponie[NdÉ 1], marqué de taches noires, qu’indique Linnæus[1], ne paraît être qu’une variété produite par le froid du Nord ; on sait que la plupart des animaux quadrupèdes sont naturellement blancs ou le deviennent dans les pays très froids ; il en est de même d’un grand nombre d’oiseaux : celui-ci qu’on trouve dans les montagnes de Laponie est blanc, taché de noir, et ne diffère que par cette couleur du grand duc commun ; ainsi on le peut rapporter à cette espèce comme simple variété[NdÉ 2].

Comme cet oiseau craint peu le chaud et ne craint pas le froid, on le trouve également, dans les deux continents, au nord et au midi, et non seulement on y trouve l’espèce même, mais encore les variétés de l’espèce : le jacurutu du Brésil[2], décrit par Marcgrave, est absolument le même oiseau que notre grand duc commun ; celui qui nous a été apporté des terres Magellaniques ne diffère pas assez du grand duc d’Europe pour en faire une espèce séparée[NdÉ 3] ; celui qui est indiqué par l’auteur du Voyage à la baie d’Hudson, sous le nom de hibou couronné[3], et par M. Edwards sous le nom de duc de Virginie[4][NdÉ 4], sont des variétés qui se trouvent en Amérique les mêmes qu’en Europe ; car la différence la plus remarquable qu’il y ait entre le duc commun et le duc de la baie d’Hudson et de Virginie, c’est

  1. « Strix capite aurito, corpore albido. » Linnæus, Faun. Suec., no 46. — Le grand duc de Laponie. Brisson, t. I, p. 486.
  2. « Jacurutu Brasiliensibus, Bufo Lusitanis, noctua est ; magnitudine æquat anseres : caput habet rotundum instar felis : rostrum aduncum nigrum, superiori parte longius : oculos magnos, elatos, rotundos et splendentes instar crystalli, in quibus interius circulas flavus versus extrema apparet ; latitudo oculorum aliquantô major grosso misnico ; prope aurium foramina plumas habet duos digitos longas, quæ instar aurium in acutum desinunt et attolluntur : cauda lata est, neque alæ pertingunt ad illius extremitatem ; crura pennis vestita usque ad pedes, in quibus quatuor digiti, tres anterius, unus posterius versus, atque in quolibet unguis incurvatus, niger, plusquam digitum longus et acutissimus ; pennæ totius corporis variegantur e flavo, albo et nigricante pereleganter. » Marcg., Hist. nat. Brasil., p. 199.
  3. Le grand hibou couronné est fort commun dans les terres voisines de la baie d’Hudson ; c’est un oiseau fort singulier, et dont la tête n’est guère plus petite que celle d’un chat ; ce qu’on appelle ses cornes sont des plumes qui s’élèvent précisément au-dessus du bec, où elles sont mêlées de blanc, devenant peu à peu d’un rouge brun marqueté de noir. Voyage de la baie d’Hudson, t. I, p. 55.
  4. « Cet oiseau, dit M. Edwards, est de la plus grande espèce des hiboux, et très approchant de la grandeur du hibou cornu, que nous appelons hibou aigle (grand duc) ; sa tête est aussi grosse que celle d’un chat… le bec est noir, la mandibule supérieure en est
  1. C’est le Strix scandiaca L., simple variété du Bubo maximus [Note de Wikisource : actuellement Bubo scandiacus Linnæus, espèce distincte du Bubo bubo ; voyez l’article du harfang].
  2. Le grand duc commun de notre pays (Bubo maximus [Note de Wikisource : actuellement Bubo bubo Linnæus, vulgairement grand-duc d’Europe]) est remplacé, d’après E. Brehm, dans le nord de l’Afrique par l’Ascalaphe (Bubo ascalaphus [Note de Wikisource : actuellement Bubo ascalaphus Savigny, vulgairement grand-duc ascalaphe]), dans le centre de l’Afrique par les Bubo lacteus [Note de Wikisource : actuellement Bubo lacteus Temminck, vulgairement grand-duc de Verreaux] et cineraneus [Note de Wikisource : actuellement Bubo cinerascens Guérin-Méneville, vulgairement grand-duc du Sahel], dans l’Amérique du Nord par le Bubo virginianus [Note de Wikisource : actuellement Bubo virginianus Gmelin, vulgairement grand-duc d’Amérique], qui est plus petit. Toutes ces espèces ont exactement les mêmes mœurs. [Note de Wikisource : Cette liste est loin d’épuiser toutes les espèces voisines du grand-duc d’Europe par la morphologie et par les mœurs.]
  3. Cuvier en a fait une espèce distincte, sous le nom de Strix (Bubo) magellanica [Note de Wikisource : actuellement Bubo magellanicus Lesson, vulgairement grand-duc de Magellanie].
  4. Cuvier en a fait son Strix (Bubo) virginiana, espèce fort douteuse, car, de l’avis même de Cuvier, elle ne se distingue du Bubo magellanica « que par des teintes plus douces » [Note de Wikisource : actuellement Bubo virginianus Gmelin, vulgairement grand-duc d’Amérique, reconnu espèce distincte du grand-duc de Magellanie]. Or le lecteur a déjà pu se convaincre du peu d’importance que les couleurs ont, chez les oiseaux, au point de vue de la classification.