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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/309

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ajoute que son plumage est moins beau que celui de la femelle[1], contre ce qui se voit le plus souvent dans les oiseaux : mais à ces différences près, qui sont assez légères, on retrouve dans la petite espèce tous les attributs extérieurs de la grande, et même presque toutes les qualités intérieures, le même naturel, les mêmes mœurs, les mêmes habitudes ; il semble que la petite soit éclose d’un œuf de la grande, dont le germe aurait eu une moindre force de développement.

Le mâle se distingue de la femelle par un double collier blanc et par quelques autres variétés dans les couleurs ; mais celles de la partie supérieure du corps sont presque les mêmes dans les deux sexes, et sont beaucoup moins sujettes à varier dans les différents individus, ainsi que Belon l’avait remarqué.

Selon M. Salerne, ces oiseaux ont un cri particulier d’amour qui commence au mois de mai ; ce cri est brout ou prout ; ils le répètent surtout la nuit, et on l’entend de fort loin ; alors les mâles se battent entre eux avec acharnement, et tâchent de se rendre maîtres chacun d’un certain district ; un seul suffit à plusieurs femelles, et la place du rendez-vous d’amour est battue comme l’aire d’une grange[NdÉ 1].

La femelle pond, au mois de juin, trois, quatre, et jusqu’à cinq œufs fort beaux, d’un vert luisant ; lorsque ses petits sont éclos, elle les mène comme la poule mène les siens. Ils ne commencent à voler que vers le milieu du mois d’août ; et quand ils entendent du bruit, ils se tapissent contre terre et se laisseraient plutôt écraser que de remuer de la place[2].

  1. Klein, Ordo Avium, p. 18.
  2. Salerne, Hist. nat. des oiseaux, p. 155. L’auteur n’indique point les sources où il a puisé tous ces faits ; ils ressemblent beaucoup à ce qu’on dit du coq de bruyère, qui s’appelle
  1. Nordmann décrit de la façon suivante les relations sexuelles des canepetières : « À l’entrée de la saison des amours, au mois d’avril, ces oiseaux se rassemblent dans quelque endroit de la steppe pour se disputer la possession des femelles. La bizarrerie des différents gestes et mouvements de ces mâles amoureux offre un spectacle divertissant. Le cou s’enfle ; parmi les plumes dont cette partie est revêtue, les plus longues forment, en se retroussant, un collier proéminent ; les pennes de la queue, écartées en éventail, se dressent, tandis que la queue traîne par terre. Parés de la sorte et la tête tantôt levée, tantôt baissée, ils avancent en sautant les uns contre les autres et cherchent à se blesser mutuellement à coups de bec. Après avoir chassé les individus jeunes et faibles, les vainqueurs, glorieux, se promènent d’un air majestueux en dessinant des cercles devant les femelles : cette scène est immédiatement suivie de l’accouplement. Durant ces combats, l’attention des combattants et de ceux qui en sont l’objet est tellement absorbée, qu’ils ne songent guère au danger ; ils laissent approcher le chasseur assis dans une voiture, et ne se dispersent même qu’après qu’il a tiré plusieurs coups de fusil. Il est constant que sur ces champs de bataille un mâle s’allie à plusieurs femelles ; et, à défaut d’autres preuves, une seule circonstance le démontrerait, c’est que les plus faibles d’entre les mâles ayant été obligés de quitter la place, il y reste toujours plus de femelles que de mâles ; mais il faut dire aussi que plus tard, quand la femelle couve, on trouve toujours près d’elle un mâle : il paraît donc que les femelles surnuméraires, après s’être éloignées du champ de bataille, sont recherchées par les autres mâles qui restent avec elles pendant le temps de l’incubation. »