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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/315

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Le caractère distinctif par lequel les pluviers diffèrent des outardes consiste, selon lui, dans la forme du bec, que celles-ci ont en cône courbé, et ceux-là droit et renflé par le bout. Or l’outarde des Indes, dont il s’agit ici, a le bec plutôt courbé que droit, et ne l’a point renflé par le bout comme les pluviers ; du moins c’est ainsi que l’a représenté M. Edwards[1] dans une figure que M. Brisson avoue comme exacte[2] ; je puis même ajouter qu’elle a le bec plus courbé et moins renflé par le bout que l’outarde d’Arabie de M. Edwards[3], dont la figure a paru aussi très exacte à M. Brisson[4], et qu’il a rangée sans difficulté parmi les outardes.

D’ailleurs il ne faut que jeter les yeux sur la figure de l’outarde des Indes, et la comparer avec celles des pluviers, pour reconnaître qu’elle en diffère beaucoup par le port total et par les proportions, ayant le cou plus long, les ailes plus courtes, et la forme du corps plus développée : ajoutez à cela qu’elle est quatre fois plus grosse que le plus gros pluvier, lequel n’a que seize pouces de long du bout du bec au bout des ongles[5], au lieu qu’elle en a vingt-six[6].

Le noir, le fauve, le blanc et le gris sont les principales couleurs du plumage, comme dans l’outarde d’Europe, mais elles sont distribuées différemment : le noir sur le sommet de la tête, le cou, les cuisses et tout le dessous du corps ; le fauve, plus clair sur les côtés de la tête et autour des yeux, plus brun et mêlé avec du noir sur le dos, la queue, la partie des ailes la plus proche du dos, et au haut de la poitrine, où il forme comme une large ceinture sur un fond noir ; le blanc sur les couvertures des ailes les plus éloignées du dos, le blanc mêlé de noir sur leur partie moyenne ; le gris plus foncé sur les paupières, l’extrémité des plus longues pennes de l’aile[7], de quelques-unes des moyennes et des plus courtes, et sur quelques-unes de leurs couvertures ; enfin, le gris plus clair et presque blanchâtre sur le bec et les pieds.

Cet oiseau est originaire de Bengale, où on l’appelle churge, et où il a été dessiné d’après nature[8] : il est à remarquer que le climat de Bengale est à peu près le même que celui d’Arabie, d’Abyssinie et du Sénégal, où se trouvent les deux outardes précédentes : on peut appeler celle-ci outarde moyenne, parce qu’elle tient le milieu, pour la grosseur, entre les grandes et les petites espèces.

  1. Edwards, Glanures, pl. ccl.
  2. Brisson, Ornithologie, t. V, p. 82.
  3. Edwards, Natural history of uncommon Birds, pl. xii.
  4. Brisson, Ornithologie, t. V, p. 30.
  5. Brisson, Ornithologie, t. V, p. 76.
  6. Ibidem, p. 82. Cela ne contredit pas ce que j’ai dit ci-dessus, qu’elle avait vingt pouces de haut depuis le plan de position jusqu’au sommet de la tête, parce qu’en mesurant ainsi la hauteur on ne tient compte ni de la longueur du bec, ni de celle des doigts.
  7. Comme à quelques outardes d’Europe. Voyez Animaux de Perrault, partie ii, p. 103.
  8. Edwards, Glanures, pl. ccl, t. I, chap. xv.