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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/329

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les conservent dans une espèce de pâte faite avec de la cendre tamisée et de la saumure ; d’autres Indiens dans l’huile[1] : le vernis peut aussi servir à conserver les œufs que l’on veut manger ; mais la graisse n’est pas moins bonne pour cet usage, et vaut mieux pour conserver les œufs que l’on veut faire couver, parce qu’elle s’enlève plus facilement que le vernis, et qu’il faut nettoyer de tout enduit les œufs dont on veut que l’incubation réussisse ; car tout ce qui nuit à la transpiration nuit aussi au succès de l’incubation[NdÉ 1].

J’ai dit que le concours du coq était nécessaire pour la fécondation des œufs, et c’est un fait acquis par une longue et constante expérience ; mais les détails de cet acte si essentiel dans l’histoire des animaux sont trop peu connus ; on sait, à la vérité, que la verge du mâle est double, et n’est autre chose que les deux mamelons par lesquels se terminent les vaisseaux spermatiques à l’endroit de leur insertion dans le cloaque ; on sait que la vulve de la femelle est placée au-dessus de l’anus, et non au-dessous comme dans les quadrupèdes[2] ; on sait que le coq s’approche de la poule par une espèce de pas oblique, accéléré, baissant les ailes comme un coq d’Inde qui fait la roue, étalant même sa queue à demi, et accompagnant son action d’un certain murmure expressif, d’un mouvement de trépidation et de tous les signes du désir pressant ; on sait qu’il s’élance sur la poule qui le reçoit en pliant les jambes, se mettant ventre à terre, et écartant les deux plans de longues plumes dont sa queue est composée ; on sait que le mâle saisit avec son bec la crête ou les plumes du sommet de la tête de la femelle, soit par manière de caresse, soit pour garder l’équilibre ; qu’il ramène la partie postérieure de son corps où est sa double verge, et l’applique vivement sur la partie postérieure du corps de la poule où est l’orifice correspondant ; que cet accouplement dure d’autant moins qu’il est plus souvent répété, et que le coq semble s’applaudir après par un battement d’ailes et par une espèce de chant de joie ou de victoire ; on sait que le coq a des testicules, que sa liqueur séminale réside, comme celle des quadrupèdes, dans des vaisseaux spermatiques ; on sait, par mes observations, que celle de la poule réside dans la cicatricule de chaque œuf[NdÉ 2], comme celle des femelles quadrupèdes

  1. Suite du Voyage de Tavernier, t. V, p. 225 et 226.
  2. Redi, Degli animali viventi, etc. Collection académique, partie étrangère, t. IV, p. 520, et Regnier Graaf, p. 243.
  1. On doit en dire autant de tout ce qui nuit à la respiration. Celle-ci s’effectue par les pores de la coquille.
  2. La cicatricule de l’œuf, c’est-à-dire cette tache blanche, de la grosseur d’une lentille, que l’on voit en un point de la surface du jaune, n’est nullement, comme le dit Buffon, la liqueur séminale de la poule. La poule n’a, d’ailleurs, pas plus de liqueur séminale qu’aucune autre femelle d’oiseau ou de mammifère. Quant à la cicatricule, elle représente la portion de l’œuf qui, après sa fécondation, c’est-à-dire après la fusion d’un ou plusieurs spermatozoïdes du mâle avec sa substance, se divise pour produire un nouvel animal.

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