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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/354

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celles du mâle. Or, nos poules blanches, noires, grises, fauves et de couleurs mêlées, produisent toutes des œufs parfaitement blancs : donc, si toutes ces poules étaient demeurées dans leur état de nature, elles seraient blanches, ou du moins auraient dans leur plumage beaucoup plus de blanc que de toute autre couleur ; les influences de la domesticité, qui ont changé la couleur de leurs plumes, n’ont pas assez pénétré pour altérer celle de leurs œufs. Ce changement de la couleur des plumes n’est qu’un effet superficiel et accidentel, qui ne se trouve que dans les pigeons, les poules et les autres oiseaux de nos basses-cours ; car tous ceux qui sont libres et dans l’état de nature conservent leurs couleurs, sans altération et sans autres variétés que celles de l’âge, du sexe ou du climat, qui sont toujours plus brusques, moins nuancées, plus aisées à reconnaître, et beaucoup moins nombreuses que celles de la domesticité[NdÉ 1].

  1. Je crois utile, pour compléter cette remarquable histoire du coq, d’indiquer brièvement les caractères des espèces sauvages de Gallus et ceux des principales variétés domestiques. J’emprunte une grande partie de ces détails à l’Histoire des oiseaux de M. A. E. Brehm.

    Gallus Bankiva Temm. [Note de Wikisource : actuellement Gallus gallus bankiva Temminck, vulgairement coq bankiva]. Le coq a « la tête, le cou, les longues plumes pendantes de cette dernière région d’un jaune doré brillant ; les plumes du dos d’un brun pourpre, d’un rouge brillant au milieu, bordées de brun jaune ; les longues couvertures supérieures et pendantes de la queue de même couleur que les plumes du cou ; les couvertures moyennes des ailes d’un brun châtain vif ; les grandes à reflet vert noir ; les plumes de la poitrine noires, à reflets vert doré ; les rémiges primaires d’un gris noir foncé, bordées d’un liséré plus clair ; les rémiges secondaires rouges sur les barbes externes ; les internes noires ; les plumes de la queue noires, les médianes brillantes, les autres ternes ; l’œil rouge orange ; la crête rouge ; le bec brunâtre ; les pattes d’un noir ardoisé. Ce coq a 64 centimètres et demi de long ; la longueur de l’aile est de 23 centimètres et demi, celle de la queue de 38 centimètres. »

    La femelle est plus petite, et se distingue par une crête et des appendices rostraux rudimentaires ; « les longues plumes du cou noires, bordées de blanc jaunâtre ; celles du manteau tachetées de brun noir ; celles du ventre isabelle ; les rémiges et les rectrices d’un brun noir. »

    Le Gallus Bankiva paraît être l’espèce souche de nos coqs domestiques. Il habite les îles de la Sonde où il est connu sous le nom de Kasintu, et est très répandu sur le continent indien. Rare dans l’Inde centrale, il se trouve en abondance dans l’est et le nord ; il s’étend au nord jusqu’à la frontière sud du Kachemire ; à l’ouest, jusqu’aux montagnes du Rhat ; à l’est jusqu’au sud-ouest de la Chine ; au sud jusqu’à Java. C’est, si je ne me trompe, cette espèce qui habite la Cochinchine où elle est très abondante dans les régions boisées et montagneuses. On la rencontre fréquemment sur la lisière des forêts ou dans les champs de riz entourés de bois. Toutes les troupes que j’ai vues se composaient d’un mâle et de sept ou huit femelles, parfois davantage, avec leurs poussins. Le mâle se tient d’habitude sur une élévation quelconque, une motte de terre, un tronc d’arbre, et exerce de là une surveillance très active sur le troupeau. Les femelles, confiantes dans le coq, paraissent très peu soucieuses des dangers qui sont susceptibles de les menacer. Dès que le coq aperçoit le chasseur, il pousse un cri et s’envole jusqu’à la forêt ; les femelles se sauvent en courant. Dès que la bande a atteint les fourrés, il est impossible de la revoir, mais on peut assez facilement s’en approcher tant qu’elle est dans la plaine, et c’est d’ordinaire le mâle que l’on tire le plus facilement, parce qu’il est le plus en vue. Dans certaines parties de la Cochinchine, par exemple, à quelques lieues de Bien-hoa, les coqs sauvages s’avancent très souvent jusqu’au voisinage des habitations et s’y croisent avec les poules domestiques. Aussi n’est-il pas rare de voir, dans ces localités, des poules ou des coqs domestiques offrant la plupart des caractères de l’espèce sauvage. M. A. E. Brehm dit qu’ « on chasse peu les coqs sauvages, leur