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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/391

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n’ont jamais vu de tétras ou coqs de bruyère plus grands, ni même aussi grands que l’outarde : d’ailleurs, on pourrait douter que l’oiseau désigné dans ce passage de Pline par les noms d’otis et d’avis-tarda fût notre outarde, dont la chair est d’un fort bon goût, au lieu que l’avis-tarda de Pline était un mauvais manger : damnatas in cibis ; mais on ne doit pas conclure pour cela, avec Belon, que le grand tétras n’est autre chose que l’avis-tarda, puisque Pline, dans ce même passage, nomme le tétras et l’avis-tarda, et qu’il les compare comme des oiseaux d’espèces différentes.

Pour moi, après avoir tout bien pesé, j’aimerais mieux dire : 1o que le premier tetrao dont parle Pline est le tétras de la petite espèce, à qui tout ce qu’il dit en cet endroit est encore plus applicable qu’au grand ;

2o Que son grand tetrao est notre grand tétras, et qu’il n’en exagère pas la grosseur en disant qu’il surpasse l’outarde ; car j’ai pesé moi-même une grande outarde qui avait trois pieds trois pouces de l’extrémité du bec à celle des ongles, six pieds et demi de vol, et qui s’est trouvée du poids de douze livres ; or, l’on sait et l’on verra bientôt que, parmi les tétras de la grande espèce, il y en a qui pèsent davantage.

Le tétras[NdÉ 1] ou grand coq de bruyère a près de quatre pieds de vol : son poids est communément de douze à quinze livres ; Aldrovande dit qu’il en avait vu un qui pesait vingt-trois livres, mais ce sont des livres de Bologne, qui sont seulement de dix onces ; en sorte que les vingt-trois ne font pas quinze livres de seize onces. Le coq noir des montagnes de Moscovie, décrit par Albin, et qui n’est autre chose qu’un tétras de la grande espèce, pesait dix livres sans plumes et tout vidé ; et le même auteur dit que les lieures de Norvège, qui sont de vrais tétras, sont de la grandeur d’une outarde[1].

Cet oiseau gratte la terre comme tous les frugivores ; il a le bec fort et tranchant[2], la langue pointue, et dans le palais un enfoncement propor-

  1. Albin, t. Ier, p. 21.
  2. Je ne sais ce que veut dire Longolius, en avançant que cet oiseau a des vestiges de barbillons. Voyez Gesner, p. 487 : y aurait-il, parmi les grands tétras, une race ou une espèce qui aurait des barbillons, comme cela a lieu à l’égard des petits tétras ; ou bien Lon-
  1. Le Coq de bruyère a « le sommet de la tête et la gorge noirâtres ; la nuque d’un gris cendré foncé, moirée de noir ; le devant du cou moiré de cendré noirâtre ; le dos noirâtre, comme saupoudré de cendre et de brun roux, le dessus de l’aile brun noir, fortement moiré de brun roux ; les plumes de la queue noires avec quelques taches blanches ; la poitrine d’un vert brillant, presque métallique ; le ventre tacheté de blanc et de noir, surtout vers la région anale ; l’œil brun, entouré d’un cercle nu rouge-laque vif ; le bec couleur de corne. Cet oiseau a de 71 à 80 centimètres de long, et de 1,43 m à 1,51 m d’envergure ; la longueur de l’aile est de 41 à 47 centimètres, celle de la queue de 36 à 39. Il pèse en moyenne, d’après Geyer, de 5 à 6 kilogrammes. La femelle est d’un tiers plus petite que le mâle. Elle a la tête et le dessus du cou noirâtres, rayés en travers de jaune roux et de brun noir ; le reste du plumage mêlé de brun noir, de jaune roux et de gris roussâtre ; les rectrices roux marron, à raies transversales noires ; la gorge et le pli de l’aile d’un jaune marron ; la poitrine marron ; le ventre roux jaunâtre, varié de raies transversales interrompues, blanches et noires. » (Brehm.)