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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/392

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tionné au volume de la langue ; les pieds sont aussi très forts et garnis de plumes par devant ; le jabot est excessivement grand, mais du reste fait, ainsi que le gésier, à peu près comme dans le coq domestique[1] : la peau du gésier est veloutée à l’endroit de l’adhérence des muscles.

Le tétras vit de feuilles ou de sommités de sapin, de genévrier, de cèdre[2], de saule, de bouleau, de peuplier blanc, de coudrier, de myrtille, de ronces, de chardons, de pommes de pin, des feuilles et des fleurs du blé sarrasin, de la gesse, du mille-feuilles, du pissenlit, du trèfle, de la vesce et de l’orobe, principalement lorsque ces plantes sont encore tendres ; car lorsque les graines commencent à se former, il ne touche plus aux fleurs, et il se contente des feuilles ; il mange aussi, surtout la première année, des mûres sauvages, de la faîne, des œufs de fourmis, etc. On a remarqué, au contraire, que plusieurs autres plantes ne convenaient point à cet oiseau, entre autres la livèche, l’éclaire, l’hièble, l’extramoine, le muguet, le froment, l’ortie, etc.[3].

On a observé, dans le gésier des tétras que l’on a ouverts, de petits cailloux semblables à ceux que l’on voit dans le gésier de la volaille ordinaire, preuve certaine qu’ils ne se contentent point des feuilles et des fleurs qu’ils prennent sur les arbres, mais qu’ils vivent encore des grains qu’ils trouvent en grattant la terre. Lorsqu’ils mangent trop de baies de genièvre, leur chair, qui est excellente, contracte un mauvais goût ; et, suivant la remarque de Pline, elle ne conserve pas longtemps sa bonne qualité dans les cages et les volières où l’on veut quelquefois les nourrir par curiosité[4].

La femelle ne diffère du mâle que par la taille et par le plumage, étant plus petite et moins noire ; au reste, elle l’emporte sur le mâle par l’agréable variété des couleurs, ce qui n’est point l’ordinaire dans les oiseaux, ni même dans les autres animaux, comme nous l’avons remarqué en faisant l’histoire des quadrupèdes ; et, selon Willughby, c’est faute d’avoir connu cette exception que Gesner a fait de la femelle une autre espèce de tétras sous le nom de grygallus major[5], formé de l’allemand grugel-hahn ; de même qu’il a fait aussi une espèce de la femelle du petit tétras, à laquelle il a donné le nom de grygallus minor[6] : cependant Gesner prétend n’avoir

    golius ne veut-il parler que d’une certaine disposition de plumes, représentant imparfaitement des barbillons, comme il a fait à l’article de la gelinotte ? Voyez Gesner, de Avibus, p. 229.

  1. Belon, Nature des oiseaux, p. 251.
  2. Ibidem.
  3. Journal économique, Mai 1765.
  4. « In aviariis saporem perdunt. » Plin., lib. x, cap. xxii.
  5. Gesner trouve que le nom de grand francolin des Alpes conviendrait assez au grygallus major, vu qu’il ne diffère du francolin que par sa taille, étant trois fois plus gros, p. 495.
  6. En effet, Gesner dit positivement que, parmi tous les animaux, il n’est pas une seule espèce où les mâles ne l’emportent sur la femelle par la beauté des couleurs : à quoi Aldrovande oppose, avec beaucoup de raison, l’exemple des oiseaux de proie, et surtout des