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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/492

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selon le témoignage des personnes plus instruites, ce soient des pigeons ou des tourterelles, puisqu’ils n’ont ni le bec, ni la chair des perdrix, qu’ils se perchent sur les arbres, qu’ils y font leur nid, qu’ils ne pondent que deux œufs, que leurs petits ne courent point dès qu’ils sont éclos, mais que les père et mère les nourrissent dans le nid, comme font les tourterelles[1] ; telles sont encore, selon toute apparence, ces perdrix à tête bleue que Careri a vues dans les montagnes de la Havane[2] ; tels sont les manbouris, les pégassous, les pégacans de Léry, et peut-être quelques-unes des perdrix d’Amérique, que j’ai rapportées au genre des perdrix sur la foi des auteurs, lorsque leur témoignage n’était point contredit par les faits, quoiqu’il le soit, à mon avis, par la loi du climat, à laquelle un oiseau aussi pesant que la perdrix ne peut guère manquer d’être assujetti.


LA PERDRIX GRISE

Quoique Aldrovande, jugeant des autres pays par celui qu’il habitait, dise que les perdrix grises[NdÉ 1] sont communes partout, il est certain néanmoins qu’il n’y en a point dans l’île de Crète[3], et il est probable qu’il n’y en a jamais eu dans la Grèce, puisque Athénée marque de la surprise de ce que toutes les perdrix d’Italie n’avaient pas le bec rouge, comme elles l’avaient en Grèce[4] : elles ne sont pas même également communes dans toutes les parties de l’Europe ; et il paraît, en général, qu’elles fuient la grande chaleur comme le grand froid, car on n’en voit point en Afrique, ni en Laponie[5] ; et les provinces les plus tempérées de la France et de l’Allemagne sont celles où elles abondent le plus ; il est vrai que Boterius a dit qu’il n’y avait point de perdrix en Irlande[6] ; mais cela doit s’entendre des perdrix rouges, qui ne se trouvent pas même en Angleterre (selon les meilleurs

  1. Voyez le P. du Tertre, Histoire générale des Antilles, t. II, p. 254.
  2. Gemelli Careri, Voyages…, t. VI, p. 326.
  3. Voyez les Observations de Belon, liv. i, chap. x.
  4. Voyez Gesner, de Avibus, p. 680.
  5. La Barbinais Le Gentil nous apprend qu’on a tenté inutilement de peupler l’île Bourbon de perdrix. Voyage autour du monde, t. II, p. 104.
  6. Voyez Aldrovande, Ornithologia, t. II, p. 110.
  1. La Perdrix grise est considérée, par les ornithologistes modernes, comme le type d’un genre Starna distinct de celui qui comprend la Perdrix rouge (Perdix). Les Starnes sont des Gallinacés de la famille des Tétraonidés et de la sous-famille des Perdiciens. Ils se distinguent des Perdix non seulement par la coloration du plumage, mais encore par quelques autres caractères plus importants. Chez les mâles, comme chez les femelles, les tarses sont dépourvus du tubercule qui remplace l’ergot, et ils sont pourvus sur les deux faces d’écailles disposées sur deux rangées ; les troisième, quatrième et cinquième rémiges des ailes sont plus longues que les autres ; la queue est formée de 16 à 18 rectrices. [Note de Wikisource : La perdrix grise est aujourd’hui classée dans le genre Perdix sous le nom binominal de Perdix perdix Linnæus ; par contre, la perdrix rouge appartient à un autre genre, Alectoris (voyez l’article dédié).]