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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/493

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auteurs de cette nation), et qui ne se sont pas encore avancées de ce côté-là au delà des îles de Jersey et de Guernesey. La perdrix grise est assez répandue en Suède, où M. Linnæus dit qu’elle passe l’hiver sous la neige dans des espèces de clapiers qui ont deux ouvertures[1] : cette manière d’hiverner sous la neige ressemble fort à la perdrix blanche dont nous avons donné l’histoire sous le nom de lagopède ; et si ce fait n’était point attesté par un homme de la réputation de M. Linnæus, j’y soupçonnerais quelque méprise, d’autant plus qu’en France les longs hivers, et surtout ceux où il tombe beaucoup de neige, détruisent une grande quantité de perdrix ; enfin, comme c’est un oiseau fort pesant, je doute qu’il ait passé en Amérique, et je soupçonne que les oiseaux du nouveau monde, qu’on a voulu rapporter au genre des perdrix, en seront séparés dès qu’ils seront mieux connus.

La perdrix grise diffère à bien des égards de la rouge[NdÉ 1] ; mais ce qui m’autorise principalement à en faire deux espèces distinctes, c’est que, selon la remarque du petit nombre des chasseurs qui savent observer, quoiqu’elles se tiennent quelquefois dans les mêmes endroits, elles ne se mêlent point l’une avec l’autre, et que si l’on a vu quelquefois un mâle vacant de l’une des deux espèces s’attacher à une paire de l’autre espèce, la suivre et donner des marques d’empressement et même de jalousie, jamais on ne l’a vu s’accoupler avec la femelle, quoiqu’il éprouvât tout ce qu’une privation forcée et le spectacle perpétuel d’un couple heureux pouvaient ajouter au penchant de la nature et aux influences du printemps.

La perdrix grise est aussi d’un naturel plus doux que la rouge[2] et n’est point difficile à apprivoiser : lorsqu’elle n’est point tourmentée, elle se fami-

  1. Voyez Linnæus, Systema naturæ, édit. X, p. 160.
  2. M. Ray dit le contraire, p. 57 de son Synopsis ; mais comme il avoue qu’il n’y a point de perdrix rouges en Angleterre, il n’a pas été à portée de faire la comparaison par lui-même, comme l’ont faite les observateurs d’après qui je parle.
  1. Voici, d’après Brehm, les caractères de la Perdrix grise : « Elle a sur le front une large bande qui s’étend au-dessus et en arrière de l’œil ; les côtés de la tête, la gorge d’un rouge roux clair ; le dessus de la tête brun, rayé longitudinalement de jaunâtre ; le dos gris, marqué de raies transversales rouge roux, de petites lignes en zigzag noires, et de lignes claires le long des tiges des plumes ; une large bande gris cendré, moirée de noir sur la poitrine, se prolongeant sur les côtés du ventre, où elle est entrecoupée de raies transversales rouge roux, bordées de blanc ; le ventre blanc, marqué d’une grande tache brun châtain en forme de fer à cheval ; les plumes de la queue d’un rouge roux, les médianes ainsi que celles du croupion rayées transversalement de brun roux et de brun rouge ; les rémiges primaires d’un brun noir mat, tachetées et rayées transversalement de roux jaunâtre ; l’œil brun entouré d’un cercle nu, étroit et rouge ; une bande de même couleur partant de l’œil et se dirigeant en arrière ; le bec gris bleuâtre ; les pattes d’un gris blanc, rougeâtre ou brunâtre. La Starne grise a 33 centimètres de long et 55 centimètres d’envergure ; la longueur de l’aile est de 16 centimètres, celle de la queue de 8. La femelle est plus petite que le mâle ; la tache du ventre est, chez elle, moins nette et moins grande, et le dos est foncé. »