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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/542

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LE PIGEON


Il était aisé de rendre domestiques des oiseaux pesants, tels que les coqs, les dindons et les paons ; mais ceux qui sont légers et dont le vol est rapide demandaient plus d’art pour être subjugués. Une chaumière basse dans un terrain clos suffit pour contenir, élever et faire multiplier nos volailles ; il faut des tours, des bâtiments élevés, faits exprès, bien enduits en dehors et garnis en dedans de nombreuses cellules, pour attirer, retenir et loger les pigeons : ils ne sont réellement ni domestiques comme les chiens et les chevaux, ni prisonniers comme les poules ; ce sont plutôt des captifs volontaires, des hôtes fugitifs, qui ne se tiennent dans le logement qu’on leur offre qu’autant qu’ils s’y plaisent, autant qu’ils y trouvent la nourriture abondante, le gîte agréable et toutes les commodités, toutes les aisances nécessaires à la vie. Pour peu que quelque chose leur manque ou leur déplaise, ils quittent et se dispersent pour aller ailleurs : il y en a même qui préfèrent constamment les trous poudreux des vieilles murailles aux boulins les plus propres de nos colombiers ; d’autres qui se gîtent dans des fentes et des creux d’arbres ; d’autres qui semblent fuir nos habitations et que rien ne peut y attirer, tandis qu’on en voit, au contraire, qui n’osent les quitter et qu’il faut nourrir autour de leur volière qu’ils n’abandonnent jamais. Ces habitudes opposées, ces différences de mœurs sembleraient indiquer qu’on comprend sous le nom de pigeons[NdÉ 1] un grand nombre d’espèces diverses dont chacune aurait son naturel propre et différent de celui des autres ; et ce qui semblerait confirmer cette idée, c’est l’opinion de nos nomenclateurs modernes, qui comptent, indépendamment d’un grand nombre de variétés, cinq espèces de pigeons, sans y comprendre ni les ramiers, ni les tourterelles. Nous séparerons d’abord ces deux dernières espèces de celles des pigeons ; et comme ce sont, en effet, des oiseaux qui

  1. Les Pigeons forment le type d’un ordre d’oiseaux ne comprenant que deux familles, les Colombidés et les Didunculidés. L’ordre des Pigeons est caractérisé par un bec faible, membraneux, renflé autour des narines ; des ailes pointues, de taille moyenne ; des pieds formés de quatre doigts libres, articulés au même niveau et dirigés trois en avant, un en arrière. Dans la famille des Colombidés, les bords du bec ne sont jamais dentés ; le dos et l’extrémité du bec sont seuls cornés ; les tarses sont assez courts et les talons sont ordinairement emplumés.