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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/543

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diffèrent spécifiquement les uns des autres, nous traiterons de chacun dans un article séparé.

Les cinq espèces de pigeons indiquées par nos nomenclateurs sont : 1o le pigeon domestique ; 2o le pigeon romain, sous l’espèce duquel ils comprennent seize variétés ; 3o le pigeon biset ; 4o le pigeon de roche avec une variété ; 5o le pigeon sauvage[1]. Or, ces cinq espèces, à mon avis, n’en font qu’une, et voici la preuve : le pigeon domestique et le pigeon romain avec toutes ses variétés, quoique différents par la grandeur et par les couleurs, sont certainement de la même espèce, puisqu’ils produisent ensemble des individus féconds et qui se reproduisent. On ne doit donc pas regarder les pigeons de volière et les pigeons de colombier, c’est-à-dire les grands et les petits pigeons domestiques, comme deux espèces différentes, et il faut se borner à dire que ce sont deux races dans une seule espèce, dont l’une est plus domestique et plus perfectionnée que l’autre ; de même, le pigeon biset, le pigeon de roche et le pigeon sauvage sont trois espèces nominales qu’on doit réduire à une seule, qui est celle du biset, dans laquelle le pigeon de roche et le pigeon sauvage ne sont que des variétés très légères, puisque, de l’aveu même de nos nomenclateurs, ces trois oiseaux sont à peu près de la même grandeur, que tous trois sont de passage, se perchent, ont en tout les mêmes habitudes naturelles et ne diffèrent entre eux que par quelques teintes de couleurs.

Voilà donc nos cinq espèces nominales déjà réduites à deux, savoir, le biset et le pigeon, entre lesquelles deux il n’y a de différence réelle, sinon que le premier est sauvage et le second est domestique : je regarde le biset comme la souche première de laquelle tous les autres pigeons tirent leur origine[NdÉ 1], et duquel ils diffèrent plus ou moins, selon qu’ils ont été plus ou moins maniés par les hommes. Quoique je n’aie pas été à portée d’en faire l’épreuve, je suis persuadé que le biset et le pigeon de nos colombiers produiraient ensemble s’ils étaient unis ; car il y a moins loin de notre petit pigeon domestique au biset qu’aux gros pigeons pattus ou romains, avec lesquels néanmoins il s’unit et produit ; d’ailleurs nous voyons dans cette

  1. Brisson, Ornithologie, t. Ier, p. 68 jusqu’à 89.
  1. « Le Biset (Columba livia L. [Note de Wikisource : actuellement Columba livia Gmelin, vulgairement pigeon biset]) ou Pigeon de roche a le dos bleu cendré clair, le ventre bleuâtre ; la tête d’un bleu d’ardoise clair ; le cou d’un bleu d’ardoise foncé, à reflets vert bleu clair dans sa partie supérieure, pourpre dans sa partie inférieure ; le bas du dos blanc ; l’aile traversée par deux bandes noires ; les rémiges d’un gris cendré ; les rectrices d’un bleu foncé, avec la pointe noire, et les barbes extrêmes des latérales blanches ; l’œil jaune soufre, le bec noir à la pointe et bleu clair à la base ; les pattes d’un rouge violet foncé. Les couleurs varient peu suivant les sexes. Les jeunes sont plus foncés que les vieux. Cet oiseau a 36 centimètres de long et 63 centimètres d’envergure ; la longueur de l’aile est de 22 centimètres ; celle de la queue de 12. » (Brehm.) L’opinion émise par Buffon, d’après laquelle le Biset serait la souche de tous nos pigeons domestiques, est aujourd’hui admise par la très grande majorité des naturalistes.