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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/551

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couver assidûment ; elle ne commence à couver constamment qu’après la ponte du second œuf : l’incubation dure ordinairement dix-huit jours, quelquefois dix-sept, surtout en été, jusqu’à dix-neuf ou vingt jours en hiver. L’attachement de la femelle à ses œufs est si grand, si constant, qu’on en a vu souffrir les incommodités les plus grandes et les douleurs les plus cruelles plutôt que de les quitter : une femelle, entre autres, dont les pattes gelèrent et tombèrent, et qui malgré cette souffrance et cette perte de membres, continua sa couvée jusqu’à ce que ses petits fussent éclos ; ses pattes avaient gelé parce que son panier était tout près de la fenêtre de sa volière.

Le mâle, pendant que sa femelle couve, se tient sur le panier le plus voisin, et au moment que, pressée par le besoin de manger, elle quitte ses œufs pour aller à la trémie, le mâle, qu’elle a appelé auparavant par un petit roucoulement, prend sa place, couve ses œufs, et cette incubation du mâle dure deux ou trois heures chaque fois, et se renouvelle ordinairement deux fois en vingt-quatre heures.

On peut réduire les variétés de la race des pigeons mondains à trois pour la grandeur, qui toutes ont pour caractère commun un filet rouge autour des yeux :

1o Les premiers mondains[NdÉ 1] sont des oiseaux lourds et à peu près gros comme de petites poules : on ne les recherche qu’à cause de leur grandeur, car ils ne sont pas bons pour la multiplication ;

2o Les bagadais[NdÉ 2] sont de gros mondains avec un tubercule au-dessus du bec en forme d’une petite morille et un ruban rouge beaucoup plus large autour des yeux, c’est-à-dire une seconde paupière charnue rougeâtre qui leur tombe même sur les yeux lorsqu’ils sont vieux et les empêche alors de voir ; ces pigeons ne produisent que difficilement et en petit nombre.

Les bagadais ont le bec courbé et crochu, et ils présentent plusieurs variétés : il y en a de blancs, de noirs, de rouges, de minimes, etc.

3o Le pigeon espagnol, qui est encore un pigeon mondain, aussi gros qu’une poule et qui est très beau : il diffère du bagadais en ce qu’il n’a point de morille au-dessus du bec, que la seconde paupière charnue est moins saillante, et que le bec est droit au lieu d’être courbé ; on le mêle avec le bagadais, et le produit est un très gros et très grand pigeon ;

4o Le gigeon turc[NdÉ 3], qui a, comme le bagadais, une grosse excroissance au-dessus du bec avec un ruban rouge qui s’étend depuis le bec autour des yeux : ce pigeon turc est très gros, huppé, bas de cuisses, large

  1. Columba admista de certains ornithologistes [Note de Wikisource : les races actuellement ne portent plus de nom latin]. Le pigeon mondain est la race la plus domestiquée de toutes celles que l’homme a créées ; sa familiarité n’a pas de limites et il s’accouple avec toutes les autres races et variétés. Les pigeons mondains sont gros, robustes, très féconds et très faciles à nourrir.
  2. Columba tuberculosa [Note de Wikisource : les races actuellement ne portent plus de nom latin]. Le Bagadais est une race d’amateur qui coûte fort cher et n’est que peu utile.
  3. Columba turcica [Note de Wikisource : les races actuellement ne portent plus de nom latin]. Brehm pense que le Pigeon turc dérive du romain et du bagadais.