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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/604

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britannique réclame contre cette proscription, et prétend qu’ils font plus de bien que de mal, en ce qu’ils consomment une grande quantité de ces larves de hannetons et d’autres scarabées qui rongent les racines des plantes utiles, et qui sont si redoutées des laboureurs et des jardiniers[1]. C’est un calcul à faire.

Non seulement le freux vole par troupes, mais il niche aussi, pour ainsi dire, en société avec ceux de son espèce, non sans faire grand bruit, car ce sont des oiseaux très criards, et principalement quand ils ont des petits. On voit quelquefois dix ou douze de leurs nids sur le même chêne et un grand nombre d’arbres ainsi garnis dans la même forêt, ou plutôt dans le même canton[2] ; ils ne cherchent pas les lieux solitaires pour couver ; ils semblent, au contraire, s’approcher dans cette circonstance des endroits habités ; et Schwenckfeld remarque qu’ils préfèrent communément les grands arbres qui bordent les cimetières[3], peut-être parce que ce sont des lieux fréquentés, ou parce qu’ils y trouvent plus de vers qu’ailleurs ; car on ne peut soupçonner qu’ils y soient attirés par l’odeur des cadavres, puisque, comme nous l’avons dit, ils ne touchent point à la chair. Frisch assure que si, dans le temps de la ponte, on s’avance sous les arbres où ils sont ainsi établis, on est bientôt inondé de leur fiente.

Une chose qui pourra paraître singulière, quoique assez conforme à ce qui se passe tous les jours entre des animaux d’autres espèces, c’est que, lorsqu’un couple apparié travaille à faire son nid, il faut que l’un des deux reste pour le garder, tandis que l’autre va chercher des matériaux convenables : sans cette précaution, et s’ils s’absentaient tous deux à la fois, on prétend que leur nid serait pillé et détruit dans un instant par les autres freux habitants du même arbre, chacun d’eux emportant dans son bec son brin d’herbe on de mousse pour l’employer à la construction de son propre nid[4].

Ces oiseaux commencent à nicher au mois de mars, du moins en Angleterre[5] ; ils pondent quatre ou cinq œufs plus petits que ceux du corbeau, mais ayant des taches plus grandes, surtout au gros bout. On dit que le mâle et la femelle couvent tour à tour. Lorsque les petits sont éclos et en état de manger, ils leur dégorgent la nourriture qu’ils savent tenir en réserve dans leur jabot, ou plutôt dans une espèce de poche formée par la dilatation de l’œsophage[6].

Je trouve dans la Zoologie britannique que, la ponte étant finie, ils quittent les arbres où ils avaient niché ; qu’ils n’y reviennent qu’au mois d’août

  1. Voyez British Zoology, p. 77.
  2. Frisch, planche 66.
  3. Aviarium Silesiæ, p. 242.
  4. Voyez l’Ornithologie de Willughby, p. 84.
  5. British Zoology, p. 76.
  6. Willughby, p. 84.