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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/605

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et ne commencent à réparer leurs nids ou à les refaire qu’au mois d’octobre[1]. Cela suppose qu’ils passent à peu près toute l’année en Angleterre ; mais en France, en Silésie et en beaucoup d’autres contrées, ils sont certainement oiseaux de passage, à quelques exceptions près, et avec cette différence qu’en France ils annoncent l’hiver, au lieu qu’en Silésie ils sont les avant-coureurs de la belle saison[2].

Le freux habite en Europe, selon M. Linnæus ; cependant il paraît qu’il y a quelques restrictions à faire à cela, puisque Aldrovande ne croyait pas qu’il s’en trouvât en Italie[3].

On dit que les jeunes sont bons à manger et que les vieux mêmes ne sont pas mauvais, lorsqu’ils sont bien gras[4] ; mais il est fort rare que les vieux prennent de la graisse. Les gens de la campagne ont moins de répugnance pour leur chair, sachant fort bien qu’ils ne vivent pas de charognes, comme la corneille et le corbeau.


LA CORNEILLE MANTELÉE

Cet oiseau[NdÉ 1] se distingue aisément de la corbine et de la frayonne ou du freux par les couleurs de son plumage : il a la tête, la queue et les ailes d’un beau noir avec des reflets bleuâtres, et ce noir tranche avec une espèce de scapulaire gris blanc qui s’étend par devant et par derrière, depuis les épaules jusqu’à l’extrémité du corps ; c’est à cause de cette espèce de scapulaire ou de manteau que les Italiens lui ont donné le nom de monacchia (moinesse), et les Français celui de corneille mantelée.

Elle va par troupes nombreuses comme le freux et elle est peut-être encore plus familière avec l’homme, s’approchant par préférence, surtout pendant l’hiver, des lieux habités, et vivant alors de ce qu’elle trouve dans les égouts, les fumiers, etc.

  1. British Zoology, loco citato. On dit que les hérons profitent de leur absence pour pondre et couver dans leurs nids. Aldrovande, p. 753.
  2. Voyez Schwenckfeld, Aviarium Silesiæ, p. 243. J’ai vu à Baume-la-Roche, qui est un village de Bourgogne à quelques lieues de Dijon, environné de montagnes et de rochers escarpés, et où la température est sensiblement plus froide qu’à Dijon ; j’ai vu, dis-je, plusieurs fois en été une volée de freux qui logeait et nichait depuis plus d’un siècle, à ce qu’on m’a assuré, dans des trous de rochers exposés au sud-ouest, et où l’on ne pouvait atteindre à leurs nids que très difficilement et en se suspendant à des cordes. Ces freux étaient familiers jusqu’à venir dérober le goûter des moissonneurs : ils s’absentaient sur la fin de l’été pour une couple de mois seulement, après quoi ils revenaient à leur gîte accoutumé. Depuis deux ou trois ans ils ont disparu et ont été remplacés aussitôt par des corneilles mantelées.
  3. « Ejusmodi cornicem, quod sciam, Italia non alit », t. Ier, p. 752.
  4. Belon, Nature des oiseaux, p. 284. M. Hébert m’assure que le freux est presque toujours maigre, en quoi il diffère, dit-il, de la corbine et de la mantelée.
  1. Corvus Cornix L. [Note de Wikisource : noms binominal et vulgaire inchangés depuis Linnæus].