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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/613

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qu’ils étaient noirs dans le sujet décrit par M. Brisson, que, selon cet auteur, ils sont quelquefois jaunes[1], et que selon d’autres ils sont jaunes l’hiver et rouges l’été[NdÉ 1]. Ces pieds jaunes, ce bec de même couleur, et plus petit que celui du choucas, ont donné lieu à quelques-uns de prendre le chocard pour un merle, et de le nommer le grand merle des Alpes. Cependant, en l’observant et le comparant, on trouvera qu’il approche beaucoup plus des choucas par la grosseur de son corps, par la longueur de ses ailes, et même par la forme de son bec, quoique plus menu, et par ses narines recouvertes de plumes, quoique ces plumes soient moins fermes que dans les choucas.

J’ai indiqué, à l’article du crave ou coracias, les différences qui sont entre ces deux oiseaux, dont Belon et quelques autres, qui ne les avaient pas vus, n’ont fait qu’une seule espèce.

Pline croit son pyrrhocorax propre et particulier aux montagnes des Alpes[2] ; cependant Gesner, qui le distingue très bien d’avec le crave ou coracias, dit qu’il y a certaines contrées au pays des Grisons où cet oiseau ne se montre que l’hiver, d’autres où il paraît à peu près toute l’année, mais que son vrai domicile, son domicile de préférence, celui où il se trouve toujours par grandes bandes, c’est le sommet des hautes montagnes. Ces faits modifient, comme l’on voit, l’opinion de Pline, un peu trop absolue, mais ils la confirment en la modifiant.

La grosseur du chocard est moyenne entre celle du choucas et celle de la corneille ; il a le bec plus petit et plus arqué que l’un et l’autre, la voix plus aiguë, plus plaintive que celle des choucas, et fort peu agréable[3].

Il vit principalement de grains et fait grand tort aux récoltes ; sa chair est un manger très médiocre. Les montagnards tirent de sa façon de voler des présages météorologiques : si son vol est élevé, on dit qu’il annonce le froid, et lorsqu’il est bas, il promet un temps plus doux[4][NdÉ 2].


  1. Voyez Ornithologie de M. Brisson, t. II, p. 31.
  2. Historia naturalis, lib. x, cap. xlviii.
  3. Schwenckfeld dit que le pyrrhocorax, qu’il appelle aussi corbeau de nuit, est criard, surtout pendant la nuit, et qu’il se montre rarement pendant le jour ; mais je ne suis point sûr que Schwenckfeld entende le même oiseau que moi, sous ce nom de pyrrhocorax.
  4. Voyez Gesner, loco citato.
  1. Les Chocards (Pyrrhocorax) ont un bec bien distinct de celui des Corbeaux par sa forme ; il est arrondi à la base et comprimé à la pointe qui est échancrée. Leurs ailes sont longues et pointues ; leur queue est arrondie. [Note de Wikisource : Ce genre contient seulement deux espèces : le chocard à bec jaune qui fait l’objet de cet article, et le crave à bec rouge décrit à l’article du crave ou coracias.] Le Chocard des Alpes (Pyrrhocorax alpinus [Note de Wikisource : actuellement Pyrrhocorax graculus Linnæus, vulgairement chocard à bec jaune]) est d’un noir terne à l’état jeune et d’un noir velouté quand il est vieux.
  2. « Les Chocards, dit Tschudi, passent, comme tous les animaux des Alpes, pour prédire le temps. Les premières tombées de la neige, en automne, et les retours du froid, au printemps, les chassent de leurs hauteurs ; ils se rendent alors en foule dans le bas en poussant des cris rauques ; mais, dès que la saison est bien établie, ils retournent dans leur patrie, où les grands froids ne les empêchent pas de rester et de voler gaiement au-dessus des plus hautes cimes. Ils ne s’en éloignent que pour aller se nourrir des baies des buissons, seuls fruits dont la récolte leur soit abandonnée. Comme toutes les espèces de cor-