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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/676

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qu’ils y trouvent des insectes. Pour moi, j’ai fait élever de ces oiseaux, et j’ai remarqué que lorsqu’on leur présentait de petits morceaux de viande crue, ils se jetaient dessus avec avidité et les mangeaient de même ; si c’était un calice d’œillet contenant de la graine formée, ils ne le saisissaient pas sous leurs pieds, comme font les geais, pour l’éplucher avec le bec, mais le tenant dans le bec, ils le secouaient souvent et le frappaient à plusieurs reprises contre les bâtons ou le fond de la cage, jusqu’à ce que le calice s’ouvrit et laissât paraître et sortir la graine. J’ai aussi remarqué qu’ils buvaient à peu près comme les gallinacés, et qu’ils prenaient grand plaisir à se baigner : selon toute apparence, l’un de ceux que je faisais élever est mort de refroidissement pour s’être trop baigné pendant l’hiver.

Ces oiseaux vivent sept ou huit ans, et même plus, dans l’état de domesticité. Les sauvages ne se prennent point à la pipée, parce qu’ils n’accourent point à l’appeau, c’est-à-dire au cri de la chouette ; mais, outre la ressource des ficelles engluées et des nasses dont j’ai parlé plus haut, on a trouvé le moyen d’en prendre des couvées entières à la fois en attachant aux murailles, et sur les arbres où ils ont coutume de nicher, des pots de terre cuite d’une forme commode, et que ces oiseaux préfèrent souvent aux trous d’arbres et de murailles pour y faire leur ponte[1]. On en prend aussi beaucoup au lacet et à la pantière ; en quelques endroits de l’Italie, on se sert de belettes apprivoisées pour les tirer de leurs nids, ou plutôt de leurs trous ; car le grand art de l’homme est de se servir d’une espèce esclave pour étendre son empire sur les autres.

Les étourneaux ont une paupière interne, les narines à demi recouvertes par une membrane, les pieds d’un brun rougeâtre[2], le doigt extérieur uni à celui du milieu jusqu’à la première phalange, l’ongle postérieur plus fort qu’aucun autre, le gésier peu charnu, précédé d’une dilatation de l’œsophage, et contenant quelquefois de petites pierres dans sa cavité ; le tube intestinal, long de vingt pouces d’un orifice à l’autre, la vésicule du fiel à l’ordinaire, les cæcums fort petits, et plus près de l’anus qu’ils ne sont ordinairement dans les oiseaux.

En disséquant un jeune étourneau de ceux qui avaient été élevés chez moi, j’ai remarqué que les matières contenues dans le gésier et les intestins étaient absolument noires, quoique cet oiseau eût été nourri uniquement avec de la mie de pain et du lait : cela suppose une grande abondance de bile noire, et rend en même temps raison de l’amertume de la chair de ces oiseaux, et de l’usage qu’on a fait de leurs excréments dans les cosmétiques.

Un étourneau peut apprendre à parler indifféremment français, allemand,

  1. Olina, Uccellaria, p. 18. Schwenckfeld, Aviarium Silesiæ, p. 352.
  2. Je ne sais pourquoi Willughby a dit : « Tibiæ ad articulos usque plumosæ. » Ornithologia, p. 145. Je n’ai rien vu de pareil dans tous les étourneaux qui m’ont passé sous les yeux.