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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/691

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d’un noir brillant et lustré, car le noir est la couleur générale non seulement du plumage, mais du bec, des pieds et des ongles ; il y a cependant de légères exceptions à faire ; l’iris des yeux est blanc, et la base du bec est bordée d’un cercle rouge fort étroit ; le bec est aussi quelquefois plutôt brun que noir, suivant Albin. Au reste, la vraie couleur de la marque des ailes n’est pas un rouge décidé, selon Fernandez, mais un rouge affaibli par une teinte de roux qui prévaut avec le temps, et devient à la fin la couleur dominante de cette tache : quelquefois même ces deux couleurs se séparent, de manière que le rouge occupe la partie antérieure et la plus élevée de la tache, et le jaune la partie postérieure et la plus basse[1]. Mais cela est-il vrai de tous les individus, et n’aura-t-on pas attribué à l’espèce entière ce qui ne convient qu’aux femelles ? On sait qu’en effet, dans celles-ci, la marque des ailes est d’un rouge moins vif : outre cela, le noir de leur plumage est mêlé de gris[2], et elles sont aussi plus petites.

Le commandeur est à peu près de la grosseur et de la forme de l’étourneau ; il a environ huit à neuf pouces de longueur de la pointe du bec au bout de la queue, et treize à quatorze pouces de vol ; il pèse trois onces et demie.

Ces oiseaux sont répandus dans les pays froids comme dans les pays chauds : on les trouve dans la Virginie, la Caroline, la Louisiane, le Mexique, etc. Ils sont propres et particuliers au nouveau monde, quoiqu’on en ait tué un dans les environs de Londres ; mais c’était sans doute un oiseau privé qui s’était échappé de sa prison : ils se privent en effet très facilement, apprennent à parler, et se plaisent à chanter et à jouer, soit qu’on les tienne en cage, soit qu’on les laisse courir dans la maison ; car ce sont des oiseaux très familiers et fort actifs.

L’estomac de celui qui fut tué près de Londres ayant été ouvert, on y trouva des débris de scarabées, de cerfs-volants et de ces petits vers qui s’engendrent dans les chairs ; cependant leur nourriture de préférence, en Amérique, c’est le froment, le maïs, etc., et ils en consomment beaucoup : ces redoutables consommateurs vont ordinairement par troupes nombreuses ; et se joignant, comme font nos étourneaux d’Europe, à d’autres oiseaux non moins nombreux et non moins destructeurs, tels que les pies de la Jamaïque, malheur aux moissons, aux terres nouvellement ensemencées, sur lesquelles tombent ces essaims affamés ! Mais ils ne font nulle part tant de dommages que dans les pays chauds et sur les côtes de la mer.

Quand on tire sur ces volées combinées, il tombe ordinairement des oiseaux de plusieurs espèces, et, avant qu’on ait rechargé, il en revient autant qu’auparavant.

  1. Albin, t. Ier, p. 33.
  2. Brisson, t. II, p. 98.