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Page:Buies - Au portique des Laurentides, 1891.djvu/14

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UNE PAROISSE MODERNE

Quarante ans, cependant, devaient s’écouler avant que le curé Blyth pût revoir sa paroisse chérie. Cette fois, il y vint en chemin de fer. Partout, sur la route, il jetait des regards étonnés ; il ne reconnaissait plus rien ; et quand, enfin, le train s’arrêta et que le conducteur cria « Saint-Jérôme, » le pauvre vieillard fondit en larmes. Quelques instants il resta immobile, cloué par l’émotion sur son siège ; puis se relevant, tout tremblant encore, il sortit et s’achemina vers le presbytère. On dut lui en indiquer le chemin, à lui qui avait vu s’élever ce presbytère, pierre à pierre, sous ses yeux. Il passait maintenant dans de larges rues, devant de belles maisons ombragées de grands arbres, là où il y avait jadis à peine quelques champs qui portaient les premières moissons de la colonie. Enfin il arriva dans ce presbytère où allait le recevoir M. le curé Labelle, dans ce presbytère rendu célèbre aujourd’hui par l’homme qui l’habite depuis plus de vingt ans, rendez-vous obligé des prêtres des paroisses et des missions les plus lointaines du nord, sorte de pèlerinage où d’illustres curieux sont venus pour contempler le curé Labelle chez lui, parmi les siens, dans son rôle d’apôtre colonisateur, sur le théâtre même de ses travaux, au milieu d’un monde qu’il a virtuellement créé