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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/234

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à ses gens que la signorina l’avait prévenue de son désir d’aller dans la matinée faire visite à des amis ; qu’elle ne doutait pas que Violante ne fût sortie par la porte du jardin, puisqu’on l’avait trouvée ouverte ; que ce chemin était plus tranquille que celui de la grande route, et que peut-être ses amis étaient venus à sa rencontre par la ruelle. Lady Lansmere ajouta que la seule chose qui l’étonnât, c’était que Violante fût sortie de meilleure heure qu’elle ne le lui avait annoncé. Ayant dit ceci avec un calme propre à exclure toute espèce de doute chez ses auditeurs, lady Lansmere demanda sa voiture et, prenant avec elle Giacomo, se rendit sur-le-champ près de son fils.

Harley était à peine remis du choc et de l’émotion qu’il venait d’éprouver, qu’on annonça Randal Leslie.

« Ah ! fit lady Lansmere, M. Leslie saura peut-être quelque chose. Il lui a apporté hier une lettre de son père. Faites-le entrer. »

Le prince autrichien s’approcha d’Harley.

« J’attendrai dans la pièce voisine, dit-il à voix basse. Vous pouvez avoir besoin de moi, si vous avez des raisons de croire que Peschiera soit pour quelque chose dans tout ceci. »

Lady Lansmere, jetant un coup d’œil vers Léonard, lui dit : « Peut-être vous aussi, monsieur, pourriez-vous nous être utile, si vous consentiez à attendre un instant avec le prince. M. Leslie peut ne vouloir parler d’une affaire comme celle-ci qu’à Harley et à moi.

— C’est vrai, madame ; mais méfiez-vous de M. Leslie ! »

Tandis que l’une des portes de la chambre se refermait sur le prince et Léonard, Randal entrait par l’autre, en apparence extrêmement agité.

« Je sors de chez vous, madame, dit-il à la comtesse. On m’a dit que vous étiez ici ; pardonnez-moi si j’ai pris la liberté de vous y suivre. J’étais allé à Knightsbridge pour voir la signorina, j’y ai appris qu’elle vous avait quittée. Je vous conjure de me dire comment et pourquoi. J’ai le droit de m’en informer, car son père m’a accordé sa main. »

L’œil d’aigle d’Harley avait brillé à l’entrée de Randal. Il examina attentivement la figure du jeune homme. Son front s’obscurcit un instant en entendant les dernières paroles de celui-ci, mais il laissa à lady Lansmere le soin de répondre et de tout expliquer, ce que la comtesse fit en peu de mots.

Randal joignit les mains.

« Et elle n’est pas allée chez son père ? En êtes-vous bien sûre ?

— Le domestique de son père vient d’arriver de Norwood.

— Oh ! c’est moi qui suis cause de sa fuite ! c’est ma téméraire demande, sa crainte, son aversion. Je comprends tout ! » Et la voix de Randal exprimait le remords et le désespoir. « Pour la mettre en sûreté contre Peschiera, son père a exigé son mariage immédiat avec moi ; ses ordres ont été trop soudains, trop péremptoires, mes vœux trop empressés. Je connais sa fierté ; elle se sera enfuie pour m’échapper. Mais où est-elle allée, si elle n’est pas à Norwood ? Oh ! où est-elle ? A-t-elle d’autres amis, d’autres parents ?