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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/286

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CHAPITRE XV.

Au moment où Harley quittait sa chambre, la douce et pâle figure d’Hélène apparaissait dans le corridor. Elle s’avança timidement vers son tuteur.

« Pourrais-je vous parler, dit-elle, à voix basse, je guettais votre pas. »

Harley la regarda fixement ; puis il la suivit sans répondre dans la chambre qu’elle venait de quitter et en referma la porte.

« Moi aussi, dit-il alors, je désirais m’entretenir avec vous — mais un peu plus tard. Vous voulez me parler, Hélène — eh bien, parlez, mon enfant. Ah ! que faites-vous là ? Pourquoi ceci ? Hélène s’était agenouillée devant lui.

— Non, laissez-moi, dit-elle, résistant à la main qui voulait la relever. Laissez-moi ainsi jusqu’à ce que je vous aie tout avoué, tout expliqué, et que j’aie obtenu votre pardon. Vous m’avez dit l’autre soir une chose qui depuis n’a cessé d’être un poids sur mon cœur et sur ma conscience ; vous m’avez dit que je ne devais point avoir de secrets pour vous ; que dans la position où nous étions vis-à-vis l’un de l’autre, ce serait vous tromper. Eh bien, j’ai eu un secret pour vous ; mais… ah ! croyez-moi, j’ai été longtemps à m’en apercevoir clairement. Vous m’avez honoré d’une proposition bien au-dessus de ma naissance, comme de mon mérite. Vous m’avez dit qu’il était en mon pouvoir de vous consoler. Que pouvais-je vous répondre, moi qui vous dois cent fois plus qu’une fille ne doit à son père ? Et je croyais que mon affection était libre — qu’elle obéirait à mon devoir. Mais… mais… continua Hélène en baissant davantage la tête et d’une voix presque éteinte, je me trompais. J’ai revu celui qui avait été tout pour moi dans ce monde quand ce monde était si terrible… et alors… alors, j’ai tremblé, mes souvenirs, mes pensées m’ont terrifiée… Cependant je me suis efforcée de bannir l’idée du passé ; j’ai combattu avec courage, avec fermeté. Oh ! vous me croyez, n’est-ce pas ? Et j’espérais vaincre, mais depuis cette parole que vous m’avez dite, j’ai compris que la lutte même devait vous être révélée. C’est la première fois que nous nous trouvons ensemble, depuis que vous m’avez parlé ainsi. Et maintenant… je… je l’ai vu de nouveau, et bien que pas un mot de celle que vous avez daigné choisir pour fiancée n’ait pu encourager l’espoir chez un autre, bien qu’ici — ici même où vous êtes, il m’ait dit adieu — et nous nous soyons séparés pour toujours, cependant, milord, en échange de votre rang, de votre fortune, de tant de nobles et brillantes qualités, que devrais-je vous apporter ? Quelque chose de plus que la gratitude, l’estime, le res-