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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 2.djvu/31

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lord L’Estrange un salut en manière d’excuse, l’interrupteur se retirait lorsque Harley dit :

« Que je ne vous empêche pas de parler à votre ami, monsieur Leslie. Il est inutile de vous hâter pour voir Egerton, car je réclamerai le privilège d’une ancienne amitié pour obtenir la première entrevue.

— C’est le neveu de M. Egerton, Frank Hazeldean.

— Rappelez-le, je vous prie et me présentez à lui. Il a une de ces figures qui auraient réconcilié Timon avec les Athéniens. »

Randal obéit ; après quelques paroles gracieuses adressées à Frank, Harley persista à vouloir laisser ensemble les deux jeunes gens et reprit sa course vers Downing-Street.


CHAPITRE IX.

« Ce lord L’Estrange a l’air d’un bien bon garçon.

— Hum ! comme ça. C’est un humoriste efféminé ; il débite les choses les plus absurdes du ton d’un homme qui les croit fort sages. Mais n’importe. Vous vouliez me parler, Frank ?

— Oui, je vous suis si reconnaissant de m’avoir présenté à Lévy, que je veux vous dire avec quelle générosité il s’est conduit.

— Un instant ; permettez-moi de vous faire observer que je ne vous ai pas présenté à Lévy. Vous l’aviez déjà vu chez Borrowell, si je ne me trompe, et il a dîné avec nous au Clarendon. Je ne suis pour rien de plus dans votre connaissance réciproque. Je vous ai au contraire plutôt prémuni contre lui. Ne venez pas dire, je vous prie, que je vous ai présenté à un homme qui, tout agréable, tout honnête peut-être qu’il soit, n’en est pas moins un usurier. Votre père serait avec raison irrité contre moi si je l’avais fait.

— Ah bast ! Vous avez des préventions contre ce pauvre Lévy. Mais écoutez seulement. J’étais tristement dans ma chambre, songeant à ces maudits billets, et à me demander comment je ferais pour les renouveler, lorsque Lévy entra. Après m’avoir parlé de sa vieille amitié pour mon oncle Egerton et de son estime pour vous, et m’avoir dit (donnez-moi la main, Randal) combien il était touché de votre sympathie pour mes peines et mes embarras, il ouvrit son portefeuille et me montra que tous mes billets étaient maintenant en sa possession.

— Comment cela ?

— Il les avait rachetés. Cela devait, disait-il, être si désagréable pour moi de les voir passer de l’un à l’autre sur la place de Londres ; et d’ailleurs il était certain, ajoutait-il, que les juifs finiraient tôt ou tard par s’adresser à mon père. « Maintenant, a-t-il ajouté, je ne suis pas très-pressé de rentrer dans cet argent, et il nous faut conve-