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Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/67

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le difficile. Thornton se trouvait là et je n’ai pas été content de l’expression de ses yeux quand il m’a vu empocher l’argent.

Croiriez-vous, continua Tyrrell après un instant de silence, que je suis suivi depuis hier par un diable d’individu qui ne me perd pas de vue une minute ? Partout où je vais je suis sûr de le rencontrer. Il a toujours l’air de me surveiller de loin ; et ce qu’il y a de pis, c’est qu’il se drape si bien et prend tellement soin de se tenir à distance, qu’il m’a été impossible d’apercevoir un* seul trait de sa physionomie. »

Je ne sais pourquoi, à ce moment, la singulière figure masquée que j’avais vue sur la lande au delà du terrain des courses, me revint à l’esprit.

« Ne porte-t-il pas un grand manteau de cheval ? dis-je à Tyrrell.

— Oui, me répondit-il, avec surprise, est-ce que vous l’avez remarqué ?

— J’ai vu un homme qui se rapporte à ce signalement, sur le champ de courses, lui dis-je, mais pendant un instant seulement. »

Notre conversation fut interrompue par de grosses gouttes de pluie qui se mirent à tomber sur nous. Le nuage obscurcissait la lune et s’avançait d’une manière menaçante au-dessus de nos têtes. Tyrrell n’était ni d’âge, ni de complexion, ni de caractère à supporter avec la même indifférence que moi la perspective d’être trempé jusqu’aux os.

« Allons, allons ! me cria-t-il, il faut que vous fassiez marcher votre cheval plus vite ; pour tous les chevaux du monde je ne voudrais pas être mouillé. »

Le ton impératif de cette observation ne me plut pas du tout.

« Impossible, lui dis-je, d’autant plus que le cheval n’est pas à moi, et qu’il paraît boiter encore plus fort que tout à l’heure ; mais que je ne vous retienne pas.

— C’est bon, me cria Tyrrell d’une voix brève et sèche qui me plut encore moins que sa précédente observation, mais comment vais-je faire pour trouver mon chemin si je pars sans vous ?