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Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/68

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— Allez tout droit, lui dis-je, à un mille d’ici vous trouverez un poteau indicateur et vous prendrez à gauche ; vous ne serez pas longtemps sans rencontrer une côte rapide que vous descendrez ; au bas s’étend une vaste mare où vous verrez un vieil arbre d’une forme bizarre ; une fois arrivé là vous n’avez plus qu’à suivre tout droit jusqu’à une maison qui appartient à M. Dawson.

— Après, Pelham ? dépêchez-vous, dit Tyrrell d’un ton d’impatience, comme la pluie commençait à tomber dru.

— Quand vous avez dépassé cette maison, repris-je lentement, pour mieux jouir de son impatience, vous ferez environ six milles sur la droite et en moins d’une heure vous serez à Chester-Park. »

Tyrrell, sans me répondre piqua des deux. Bientôt le bruit de la pluie tombant à torrents et les mugissements du ciel en fureur me firent perdre la trace du cavalier.

En vain je cherchai des yeux un arbre, je ne pus pas même trouver le plus petit arbrisseau. La plaine s’étendait au loin, nue et aride, et de chaque côté la route était bordée par une haie morte et un fossé profond. Melius fit patientia, me dis-je, en souvenir d’Horace et de lord Vincent qui n’eût pas manqué de me faire cette citation. Voulant détourner mes pensées de ma situation présente, je me mis à songer à mes succès diplomatiques auprès de lord Chester. En ce moment, c’est-à-dire environ cinq minutes après que Tyrrell m’eut quitté, je fus dépassé par un cavalier au grand trot ; la lune était cachée par les nuages ; et la nuit sans être tout à fait noire était cependant sombre et obscure ; aussi ne pus-je distinguer que l’apparence générale de ce cavalier. Un frisson de frayeur parcourut tout mon corps quand je vis qu’il était enveloppé dans un grand manteau. Je me remis bientôt en songeant qu’au bout du compte il n’y avait pas qu’un seul manteau au monde ; d’ailleurs, me disais-je, si c’est là l’homme qui poursuit Tyrrell, le baronnet est mieux monté que n’importe quel voleur de grand chemin ne l’a jamais été depuis le temps de Du Val. Outre cela il est assez fort et assez adroit pour se défendre admirablement. Ces réflexions calmèrent mes inquiétudes d’un moment et je me remis de plus belle à me