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Page:César - Le forgeron de Thalheim, 1885.djvu/161

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le forgeron de thalheim

disposition de la veille, l’isolement où elle vivait quand le père était occupé dans la forêt, au loin. Le pauvre homme y perdait son latin, comme on dit. Cependant, ils n’étaient pas à plaindre, cette année-là surtout. L’argent ne manquait plus dans le ménage. La récolte des fruits avait été bonne, la Rouge donnait un lait crémeux, avec lequel on faisait un beurre doré, frais et appétissant, bien recherché à la ville ; une dizaine de poules, tout en becquetant et caquetant, fournissaient la petite monnaie nécessaire aux besoins de tous les jours. Aussi le père, dans l’espoir de ramener quelques éclats de rire au logis, avait acheté pour Georgette une robe de laine brune, un simple manteau d’hiver, et un chapeau orné d’une fleur rouge qui tranchait admirablement bien sur le noir éburnéen de son opulente chevelure. Ce fut une dépense de soixante-dix francs, que le brave homme ne regretta pas, car le soir où il rapporta ces objets de toilette à sa fille, elle lui sauta au cou en pleurant, et dit :

— Ah ! père, que ta bonté est grande ! je ne méritais pas tant.

— Toi, toi, Georgette ! — Tu es ma seule joie