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Page:Cailhava de l’Estandoux - L’égoïsme, 1777.djvu/126

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L’ÉGOÏSME,

PHILEMON.

Pensez-vous ?…

POLIDOR.

Pensez-vous ?…Tout concourt à dessiller mes yeux.
Ces éloges outrés que, d’un ton emphatique
Vous donnez aux vertus, l’homme qui les pratique,
Loin d’affecter d’en faire un éloge éternel,
En secret, dans son cœur, leur élève un autel :
Votre art à démêler des vices dans les autres,
À les mettre en avant pour mieux cacher les vôtres ;
Ce Livre dangereux, cet ouvrage pervers,
Qui jeta votre frere & Durand dans les fers…

PHILEMON.

Il n’est pas de moi…

POLIDOR.

Il n’est pas de moi…Vois à quoi le vice engage.
Il te force à rougir même de ton ouvrage.
L’Imprimeur a parlé.

PHILEMON, à part.

L’Imprimeur a parlé.Je n’en puis revenir.

POLIDOR.

Pour son propre intérêt il devoit te trahir.
Pourquoi faire à Durand un présent si nuisible ?

PHILEMON.

Hélas ! il faut s’en prendre à mon cœur trop sensible.
Hors mon ouvrage, alors je ne possédois rien ;
Je gémissois de voir mon Précepteur sans bien ;
Il fut, me suis-je dit, l’appui de ma jeunesse ;
C’est à moi désormais d’étayer sa vieillesse.

POLIDOR.

Étayer sa vieillesse ! Eh comment ! Juste Ciel !
En mettant sous son nom un Livre plein de fiel ;