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Page:Cailhava de l’Estandoux - L’égoïsme, 1777.djvu/7

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vii
Préface.

offre d’autant plus de difficultés, qu’on ne s’est pas encore arrangé dans le monde sur la signification du mot Égoïsme. Avec de la réflexion on voit aisément que l’amour de soi & l’amour qu’on ressent pour un Amant, pour une Amante, ont autant de caractères divers qu’il y a d’individus sur la terre ; qu’ils peuvent inspirer la pitié, la reconnoisance, l’admiration, le mépris ; qu’ils conduisent enfin au vice ou à la vertu, suivant les cœurs plus ou moins vicieux, plus ou moins vertueux qu’ils affectent ; mais les merveilleux du siècle, accoûtumés à se dire avec grace, vous êtes un Égoïste, comme vous êtes un aimable Roué, n’ont garde d’imaginer que l’amour de soi mal entendu, & tel qu’on doit le peindre de préférence au Théâtre, éteint tous les sentimens chers à la nature, & ne conçoit l’idée des secours mutuels que pour les tourner tous à son avantage. Nos Égoïstes veulent absolument resserrer leurs portraits dans la petite manie de parler souvent de foi ; ils daignent souffrir qu’on les peigne, pourvu qu’on les fasse minauder avec grace. C’est ici le cas de s’écrier avec Alceste :

Têtebleu ! ce me sont de mortelles blessures,
De voir qu’avec le vice on garde des mesures.

Les difficultés dont nous venons de parler,