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Page:Carmontelle - Conversations des gens du monde, tome 1.djvu/293

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elle finit toujours par leur trouver un mérite surprenant. Vous conviendrez bien que ce n’est pas là le ton que doit avoir une femme de qualité ; elle n’est pas faite pour chercher à déterrer le mérite.

Mad. de Sourdeil.

Cela prouve la bonté de son cœur.

La Comtesse.

Je ne le sais que trop ! mais quel fruit en retire-t-on ? On n’est obsédé que de malheureux, cela n’est bon à rien. Voilà ce que je lui répète sans cesse ; cela n’est pas long. Il faut avoir la plus grande attention pour les Gens en place, quand ils ne seroient que des sots ; prendre le ton au-dessus de ses égaux ; ils en seront étonnés d’abord, mais ils finiront par vous céder le pas. Après, dédaignez tout le reste, mérite ou non, cela est égal.

Mad. de Sourdeil.

Ce ne sont pas là trop les moyens d’être aimé.

La Comtesse.

Et de qui est-on jamais aimé ? On est envié, jalousé, tant qu’on est en faveur ; déchiré, méprisé, dès qu’on n’y est plus ; alor, de quelle ressource peuvent être les amis obscurs ?