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Page:Champion - Catherine de Médicis présente à Charles IX son royaume, 1937.pdf/24

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PRÉFACE

dans son éthique : mais il demeure toujours net, plein de relief, et d’un détail réaliste surprenant.

Cette information des ambassadeurs répondait exactement aux renseignements demandés par Philippe II, destinés à être utilisés par ses bureaux, ses ministres, et ses juges d’Église. Car on peut dire que depuis les dernières années de Henri II, en ce qui concernait la France, une politique d’une rare constance a été suivie par le Roi Catholique, pour la protection de la religion, qui devait sauvegarder l’Espagne, les États de la maison de Bourgogne incorporés aux Pays-Bas, la foi et la civilisation tout ensemble.

Rien de plus passionnant, et de plus passionné, que ces relations espagnoles.

Il existe naturellement, pour ces années 1564-1566, d’autres diplomates informateurs. Parmi les Anglais, Smith et Throckmorton[1], qui n’aimèrent guère la France ; et, parmi les Italiens, les Vénitiens, qui l’aimèrent beaucoup[2].

Les Vénitiens demeurent les maîtres du portrait, du rapport. Leur raccourci présente souvent un chef-d’œuvre saisissant, intelligent, humain. C’est d’après Giovanni Soranzo e Badoero que j’ai dessiné Philippe II.

Et d’autres, comme les Florentins, amis de la reine-mère, brillent de la lucidité d’une intelligence accordée à la lumière de leur pays, et furent des artistes et des observateurs philosophes, tel le médecin Cavriana qui est admirable.

Chez les Anglais, on trouve un détail personnel, irritant à la longue ; chez les Italiens s’affirment la sérénité et la bienveillance. Cependant les Espagnols me semblent uniques pour cette époque. Ils sont les maîtres de l’observation réaliste, comme leurs peintres et leurs artistes, avec ce goût sobre de l’introspection psychologique qui est peut-être le prolongement de la confession catholique.

Don Francès, j’ai essayé à mon tour de le surprendre par des recoupements. L’épreuve fut en sa faveur. Il est simplement véridique, et seulement passionné.

Aux Espagnols, mon récit doit à peu près tout, et je m’excuse d’être entré si avant dans la familiarité de don Francès de Alava,

  1. Calendar of state papers (foreign series) of the reign of Elizabeth, t. VII et VIII.
  2. Voir Tomasseo, Relazioni… et surtout les lettres journalières dont la copie est à la Bibl. Nat., ms. Ital., 1724 et 1725, d’Antonio Barbaro au doge.