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Page:Champion - Catherine de Médicis présente à Charles IX son royaume, 1937.pdf/47

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PROJET DU TOUR DE FRANCE

d’avoir, dans le jardin discret du couvent des Bonshommes, à Paris, un entretien de deux heures avec Throckmorton, l’ambassadeur. Elle lui avait exprimé son désir de vivre en paix avec l’Angleterre. Dieu ayant séparé ces deux royaumes d’une si « belle borne », un « large fossé d’eau », il n’y avait pas lieu de craindre des offenses réciproques. Mais l’ambassadeur entendait faire payer cette paix 500 000 écus, pour délivrer les otages retenus en Angleterre depuis le traité de Cateau-Cambrésis. Acheter aux Anglais les otages français à ce prix, jamais ! Si Elisabeth avait perdu Calais, c’était pour avoir enfreint elle-même les clauses du traité de Cateau-Cambrésis.

S’arranger enfin avec l’Espagne semblait chose indispensable à la reine-mère. Catherine de Médicis estimait que la France et l’Espagne étaient les deux grandes puissances de l’Europe, ce qui était vrai d’un temps où l’Angleterre n’avait pas encore de colonies, ni la flotte qui devait plus tard assurer ses communications maritimes. De l’accord de ces deux puissances pouvait sortir la paix universelle », comme le disait déjà son mari, Henri II. De là, chez Catherine de Médicis, l’idée d’une entrevue avec le roi d’Espagne, son gendre, qui s’ajoutait au plaisir qu’elle aurait de revoir sa fille Elisabeth, femme de Philippe II. Elle écrivait au Roi Catholique : « Le but où je tends n’est autre que de voir si nous, qui sommes les plus grands et puissants princes, estant assemblés ensemble, pourrions convenir de nous accorder d’un bon moyen, aultre que celuy des armes… » Un voyage en Languedoc semblait devoir faciliter grandement cette entrevue.

Et Catherine de Médicis profiterait encore de cette « ronde » pour gagner la Lorraine, voir les Guises, rencontrer peut-être l’Empereur. Car la reine-mère souhaiterait de pouvoir unir le jeune Charles IX à sa fille aînée ; elle pensait aussi marier le fils aîné de l’Empereur, Rodolphe, avec Marguerite de Valois, alors une bien petite fille, cette Margot, souvent malade, qui s’annonce jolie, et garçonne avec ses frères dans la troupe des pages.

Pour cela il faut des contacts directs. Car les ambassadeurs sont des espions, fort désagréables parfois, comme Perrenot de Chantonnay, que la reine-mère ne pouvait plus souffrir, et qu’elle entendait faire rappeler par Philippe II.

Ajoutons que le tour de France demeurait dans la tradition royale. Un tel voyage avait lieu, le plus souvent, après le sacre, Catherine se montrait fort respectueuse des usages de la monar-