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nant aux pauvres et doux de cœur. Sauvez-le du feu qui brûle toujours, et ne séparez point là-haut ceux qui furent unis si longtemps en bas. Priez pour lui, priez pour moi, las !

— « Femme, » dit Smelse, « tu es doncques bien marrie ? »

— « Ha, méchant homme, » dit-elle, « je sais présentement tout ; c’était le feu d’enfer qui éclatant en la maison alluma la forge, c’étaient diables ces maîtres boulangers, brasseurs et marchands de vin, diable aussi ce laid homme qui te montra le trésor et me bailla à moi l’horrifique soufflet. Qui osera vivre tranquille en cette maison d’ores en avant ? Las ! notre manger est du diable, du diable nos boissons ; du diable nos viandes, pains et fromages, du diable notre argent, maison et tout. — Qui creuserait sous ce logis verrait sourdre le feu d’enfer incontinent. Ils sont là tous, je les vois en haut, en bas, à droite, à gauche, attendant leur proie la gueule bée, comme tigres. Ha ! quel beau spectacle ce me sera de voir mon pauvre homme rompu en cent morceaux par tous les diables, et ce dans sept ans, car il l’a dit, je l’ai bien ouï, il reviendra dans sept ans. »

— « Ne ploure point, femme, » dit Smetse, « dans sept ans je pourrai comme aujourd’hui être son maître. »