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Page:Chesterton - Le Retour de Don Quichotte.djvu/165

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Son hôte fut soudain saisi d’une sorte de terreur. Il pensa que le sang même ne laverait pas cette insulte involontaire ; le silence lui crispait les nerfs, et il dit aigrement :

— Pour l’amour de Dieu, ne continuez pas à lire ce verbiage ! C’est peut-être très drôle, mais ce n’est pas drôle pour moi. Dans ma propre maison ! Vous pensez s’il m’est agréable de voir insulter un de mes hôtes, et vous moins que tout autre ! Je suis prêt à faire ce que vous me demanderez.

— Eh bien, dit le Premier — et il posa lentement le papier sur la petite table ronde — eh bien, nous la tenons, enfin !

— Nous tenons quoi ?

— Notre dernière chance.

Un silence se fit dans l’obscur salon d’été, si complet qu’on pouvait entendre le bourdonnement d’une mouche et le murmure lointain de la causerie des mutins. Comme si ce silence travaillait pour le Destin, Seawood sentit qu’il fallait le rompre à tout prix.

— Quelle dernière chance ? fit-il brusquement.

— Celle dont nous parlions il n’y a pas dix minutes, juste avant que la flèche n’entrât en volant par la fenêtre, comme la colombe avec son rameau d’olivier. N’étais-je pas en train de vous dire qu’il nous fallait quelque chose de neuf, que le pauvre vieil Empire était usé, et que nous n’avions rien à opposer à Braintree et aux nouveaux Démocrates ? Eh bien, voilà.

— Que diable voulez-vous dire ? demanda Lord Seawood.

— Je veux dire qu’il faut soutenir ce mouvement, cria le Premier, en frappant la petite table du poing. Il faut l’appuyer avec de l’infanterie, de la cavalerie