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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 11, 1867.djvu/183

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Christ ; on peut citer cette parole : « Dieu les a faits mâle et femelle ». (Gen. 1,27)
Si l’un est la tête et l’autre le corps, comment formeraient-ils deux êtres séparés ? La femme, c’est l’écolière ; le mari, c’est le maître. Le mari, c’est le chef ; la femme, c’est l’être qui obéit. La manière dont elle a été créée vous fera voir qu’elle ne fait qu’un avec son époux ; elle a été tirée d’une côte de l’homme, et tous deux sont, pour ainsi dire, les deux moitiés d’un tout. Voilà pourquoi l’homme la regarde comme son aide. Voilà pourquoi la femme quitte père et mère pour s’attacher de préférence à l’homme auquel elle va s’unir, avec lequel elle va vivre. Et un père lui-même se plaît à établir son fils et sa fille, à serrer les nœuds de ce mariage qui va rendre à un être une partie de lui-même. Que de dépenses ! Quelle perte d’argent pour ce père, avant d’en venir là ! Mais qu’est-ce que cela fait ? Ce père serait inconsolable, s’il n’établissait pas ses enfants. Chacun d’eux, en effet, quand il reste isolé, est comme une chair séparée de sa chair ; c’est un être incomplet qui ne peut procréer ; c’est un être incomplet qui n’a pas encore organisé sa vie. De là ce mot du Prophète : « C’est le reste de ton âme ». (Mal. 2,15) Mais comment ne font-ils qu’une chair ? C’est comme si vous détachiez d’un lingot d’or ses parcelles, les plus pures pour les mêler à un autre lingot. De même ici, c’est la partie la plus onctueuse du sang de l’homme que le plaisir verse dans le sein de la femme où elle se trouve développée, en se mêlant aux germes que la femme fournit. Et l’enfant joue, entre le mari et la femme, le rôle de trait d’union. Voilà donc trois êtres qui ne font qu’une chair, et dont l’un sert de lien entre les deux autres. C’est comme si deux cités, divisées par un fleuve, étaient réunies en une seule par un pont. Dans la circonstance qui nous occupe, l’union est la même, que dis-je ? elle est plus intime. Car le trait d’union est de la même nature que les deux objets unis. Les deux êtres ne font donc qu’un seul être, comme le tronc accompagné des membres ne fait qu’un même corps avec la tête. C’est le cou seul qui les sépare ; encore les unit-il autant qu’il les divise, en se trouvant au milieu d’eux. C’est comme si un chœur, après s’être séparé en deux moitiés, se recomposait avec ses membres pris à droite et à gauche. Aussi ce mot : Ils ne feront qu’une chair, est-il exact. C’est leur enfant qui produit cette union intime. Mais que dis-je ? Quand même ils n’auraient pas d’enfant, ils ne formeraient pas encore deux êtres distincts. Et le motif en est clair. C’est la cohabitation qui confond ces deux individualités en une seule ; c’est le parfum qu’on jette dans l’huile et qui s’y incorpore, de manière à ne faire qu’un avec elle.
6. Bien des gens, je le sais, sont choqués de mes paroles. Mais ce qui m’a fait aborder ce sujet, ce sont les abus introduits par la débauche et par l’impudeur. Oui, la manière dont se font les noces, ces habitudes dépravées et corrompues dégradent le mariage. « Car les noces en elles-mêmes sont honorables, et le lit nuptial est immaculé ». (Héb. 13,4) Pourquoi donc avoir honte de ce qui est honorable ? Pourquoi rougir de ce qui est immaculé ? C’est aux hérétiques de rougir ; c’est à ceux qui amènent des courtisanes. Je veux purifier le mariage pour lui rendre sa noblesse, pour fermer la bouche à l’hérésie. On a déshonoré une institution qui est un présent divin,-qui est la source du genre humain ; on y a jeté du limon et de la boue. Purifions cette source, en appelant la raison à notre aide. Un peu de courage ! Quand on ne craint pas la boue, on ne doit pas en craindre l’odeur. Je veux vous montrer que ce n’est pas le mariage, mais l’abus que vous y introduisez qui doit vous faire rougir. Vous n’avez qu’une mauvaise honte et vous condamnez Dieu qui a institué le mariage. Je vais vous dire ce que c’est que ce sacrement de l’Église. C’est le Christ qui vient trouver l’Église, l’Église née de lui et à laquelle il s’est uni par des liens spirituels. « Car je vous ai fiancés », dit l’apôtre, « à cet unique époux qui est le Christ, pour vous présenter à lui comme une vierge toute pure ». (2Cor. 11,2) Voyez comme il déclare que nous appartenons au Christ, que nous sommes les membres de ses membres, et la chair de sa chair.
Livrons-nous à ces réflexions et respectons ce mystère sublime. Eh quoi ! le mariage vous représente Jésus-Christ, et vous vous enivrez ! Dites-moi, si vous aviez devant vous l’image du souverain, ne la respecteriez-vous pas ? Ah ! sans doute, vous la respecteriez. On semble n’attacher aucune importance à la manière dont on se comporte quand on assiste à un mariage, et pourtant cette indifférence à