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Page:Claudine a l'Ecole.pdf/134

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claudine à l’école

tention. J’ai un peu de crainte pour cette immorale petite, et je l’avertirais bien de se méfier d’Armand, mais l’autre, sa despote, prétendrait tout de suite que je suis allée dénoncer sa conduite à Richelieu, au moyen de lettres anonymes, peut-être. Je m’abstiens.

Elles m’irritent avec leurs chuchotements ! Finissons-en… Je lance un « Houche ! » à demi-voix pour attirer l’attention des camarades, et nous commençons le bourdon. Le bourdon n’est d’abord qu’un murmure d’abeille, continu ; il s’enfle, grossit, et finit par entrer de force dans les oreilles de nos toquées d’institutrices, qui échangent un regard inquiet ; mais Mlle Sergent, brave, prend l’offensive :

— Silence ! Si j’entends bourdonner, je mets la classe en retenue jusqu’à six heures ! Croyez-vous que nous puissions vous donner régulièrement les leçons tant que l’École neuve ne sera pas achevée ? Vous êtes assez grandes pour savoir que vous devez travailler seules, quand l’une de nous est empêchée de vous servir de professeur. Donnez-moi un atlas. L’élève qui ne saura pas sa leçon sans faute me fera des devoirs supplémentaires pendant huit jours !

Elle a de l’allure, tout de même, cette femme laide, passionnée et jalouse, et toutes deviennent muettes aussitôt qu’elle élève la voix. La leçon est récitée tambour battant, et personne n’a envie de se « dissiper » parce qu’on sent souffler un vent menaçant de retenues et de pensums. Pendant ce