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Page:Claudine a l'Ecole.pdf/173

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claudine à l’école

fitant de son absence, j’esquisse au tableau noir une caricature du père Blanchot et de ses grands favoris, qui met les gamines en joie ; je lui ajoute des oreilles d’âne, puis je l’efface vite et je regagne ma place, où la petite Luce passe son bras sous le mien, câlinement, et tente de m’embrasser. Je la repousse d’une légère calotte, et elle prétend que je suis « bien méchante ! »

— Bien méchante ? Je vais t’apprendre à avoir avec moi des libertés pareilles ! Tâche de museler tes sentiments, et dis-moi si c’est toujours Mademoiselle Griset qui couche dans le dortoir.

— Non, Aimée y a couché deux fois deux jours de suite.

— Ça fait quatre fois. Tu es une cruche ; même pas une cruche, un siau ! Est-ce que les pensionnaires se tiennent plus tranquilles quand c’est ta chaste sœur qui couche sous le dais ?

— Guère. Et même, une nuit, une élève a été malade, on s’est levées, on a ouvert une fenêtre, j’ai même appelé ma sœur pour qu’elle me donne les allumettes qu’on ne pouvait pas trouver, elle n’a pas remué, elle n’a pas plus soufflé que s’il n’y avait personne dans le lit ! Faut-il qu’elle ait le sommeil dur ?

— Sommeil dur ! Sommeil dur ! Quelle oie ! Mon Dieu, pourquoi avez-vous permis qu’il y eût sur cette terre des êtres aussi dépourvus de toute intelligence ? J’en pleure des larmes de sang !

— Qu’est-ce que j’ai encore fait ?