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claudine à l’école

— Alors ne me demande rien. Si tu es sage, je te donnerai ma belle règle en ébène, qui a des filets en cuivre.

— Oh ! tu es gentille ! Je t’embrasserais bien, mais ça te déplaît…

— Assez ; je te la donnerai demain — si je veux !

Car la passion des « articles de bureau » s’apaise en moi, ce qui est encore un bien mauvais symptôme. Toutes mes camarades (et j’étais naguère comme elles) raffolent des « fournitures scolaires », nous nous ruinons en cahiers de papier vergé, à couvertures de « moiré métallique », en crayons de bois de rose, en plumiers laqués, vernis à s’y mirer, en porte-plumes de bois d’olivier, en règles d’acajou et d’ébène comme la mienne qui a ses quatre arêtes en cuivre, et devant laquelle pâlissent d’envie les pensionnaires trop peu fortunées pour s’en payer de semblables. Nous avons de grandes serviettes d’avocat en maroquin plus ou moins du Levant, plus ou moins écrasé. Et si les gamines ne font pas, pour leurs étrennes, gaîner de reliures voyantes leurs bouquins de classe, si je ne le fais pas non plus, c’est uniquement parce qu’ils ne sont pas notre propriété. Ils appartiennent à la commune, qui nous les fournit généreusement, sous obligation de les laisser à l’École quand nous la quittons pour n’y point revenir. Aussi, nous haïssons ces livres administratifs, nous ne les sentons pas à nous, et