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Page:Claudine a l'Ecole.pdf/316

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CLAUDINE À L’ÉCOLE

vous assure, les yeux et la bouche ne sont pas mal. La robe bruit légèrement ; la jupe de dessus, en mousseline sans empois, ondule au rythme de la marche et caresse les souliers aigus. La couronne maintenant : Ah ! qu’elle va bien ! Une petite Ophélie toute jeunette, avec des yeux cernés si drôlement !… Oui, on me disait, quand j’étais petite, que j’avais des yeux de grande personne ; plus tard, c’étaient des yeux « pas convenables » ; on ne peut pas contenter tout le monde et soi-même. J’aime mieux me contenter d’abord…

L’ennui, c’est ce gros bouquet serré et rond, qui va m’enlaidir. Bah ! puisque je le refile à Son Excellence…

Toute blanche, je m’en vais, à l’École, par les rues fraîches ; les gars, en train de « joncher », crient de gros, d’énormes compliments à la « petite mariée » qui s’enfuit, sauvage.

J’arrive en avance, et pourtant je trouve déjà une quinzaine de gamines, des petites de la campagne environnante, des fermes lointaines ; c’est habitué à se lever à quatre heures en été. Risibles et attendrissantes, la tête énorme à cause des cheveux gonflés en tortillons raides, elles restent debout pour ne pas chiffonner leurs robes de mousselines, trop passées au bleu, qui se boursouflent, rigides, nouées à la taille par des ceintures groseille ou indigo ; et leurs figures hâlées paraissent toutes noires dans ce blanc. À mon arrivée, elles ont poussé un petit « ah ! » vite contenu, et se tai-